Uranium: Guide de discussion ~ questions et réponses






Canadian Coalition
for Nuclear
Responsibility




Regroupement pour
la surveillance
du nucléaire

URANIUM

Guide de discussion

 

QUESTIONS ET RÉPONSES

par Dr Gordon Edwards et coll.

 


préparé et publié pour
l’Office national du film du Canada

et accompagnera le film « Uranium »
du réalisateur Magnus Isacsson



TABLE DES MATIÈRES :
UNE LISTE DE QUESTIONS



A. L’URANIUM ET LA RADIOACTIVITÉ

A.1. Qu’est-ce que l’uranium?
A.2. Qu’est-ce que la radioactivité?
A.3. À quelle profondeur peut pénétrer le rayonnement?
A.4. La radioactivité est-elle dangereuse?
A.5. Comment un élément radioactif peut-il générer d’autres éléments radioactifs?

B. L’URANIUM ET SES UTILISATIONS

B.1. Où trouve-t-on l’uranium?
B.2. Comment le Canada en est-il venu à s’intéresser commercialement à l’uranium?
B.3. Quel est le rôle de l’uranium dans les bombes atomiques?
B.4. Quel est le rôle de l’uranium dans les réacteurs nucléaires qui produisent de l’électricité?
B.5. Quelles sont les autres utilisations des réacteurs nucléaires?
B.6. Les utilisations pacifiques et militaires de l’uranium sont-elles incompatibles?
B.7. Le Canada a-t-il déjà produit du plutonium destiné à la fabrication de bombes?
B.8. Le Canada continue-t-il à vendre de l’uranium et du plutonium
          destinés à la fabrication de bombes?
B.9. L’uranium canadien entre-t-il encore dans la fabrication de bombes nucléaires?
B.10.Existe-t-il d’autres utilisations de l’uranium?

C. L’URANIUM ET LA FISSION NUCLÉAIRE

C.1. Qu’est-ce que la fission nucléaire?
C.2. Que sont les produits de fission?
C.3. Qu’est-ce que le strontium 90? Le césium 137?
C.4. Qu’entend-on par « retombées radioactives des armes nucléaires »?
C.5. Que sont les « déchets radioactifs de haute activité »?
C.6. Comment le plutonium et les autres éléments transuraniens sont‑ils produits?
C.7. À quoi sert le plutonium?

D. L’URANIUM ET l’INTÉRÊT PUBLIC

D.1. La production d’énergie électrique d’origine nucléaire est‑elle inévitable?
          Est-ce seulement une question de temps?
D.2. Les solutions de rechange de l’énergie nucléaire sont‑elles réalisables?
D.3. L’uranium et l’énergie nucléaire sont-ils acceptés au Canada?
          Dans le monde?
D.4. Dans quelle mesure le Canada a-t-il investi dans l’uranium et l’énergie nucléaire?
D.5. Dans quelle mesure le Canada est-il intervenu sur le marché de l’uranium?
D.6. Quel est le statut actuel du Canada sur le marché international de l’uranium?
D.7. Pourquoi est-ce que l’extraction minière de l’uranium est en expansion au Canada?
D.8. Y a-t-il des conséquences sur les droits de propriété des Autochtones?
          [réponse par Dr Jim Harding]

E. RISQUES POUR LA SANTÉ DE L’EXTRACTION MINIÈRE DE L’URANIUM

E.1. Quels sont les risques pour la santé de l’extraction minière de l’uranium?
E.2. Depuis quand sait-on que le cancer du poumon peut être causé
          par l’exposition au rayonnement dans les mines d’uranium?
E.3. Comment avons-nous appris que la radioactivité pouvait causer le cancer du poumon?
E.4. Quelles sont les matières radioactives susceptibles de causer
          le cancer du poumon chez les travailleurs de mines?
E.5. Les travailleurs des mines d’uranium d’Amérique du Nord ont‑ils été
          plus nombreux que d’autres à souffrir d’un cancer du poumon?
E.6. Aujourd’hui, les taux de cancer du poumon chez les travailleurs de mines d’uranium
          sont-ils plus élevés qu’autrefois?
E.7. Les niveaux actuels d’exposition au rayonnement des travailleurs de mines
          sont-ils considérés comme étant sûrs?
E.8. Les dangers pour la santé peuvent-ils être limités en faisant travailler
          davantage de travailleurs sur de plus courtes périodes?

F. LES RÉSIDUS D’URANIUM

F.1. Qu’entend-on par résidus d’uranium?
F.2. Qu’est-ce que le thorium 230?
F.3. Qu’est-ce que le radium 226?
F.4. Qu’est-ce que le radon 222?
F.5. Quels sont les produits de filiation du radon?
F.6. Qu’est-ce que le polonium?

G. L’URANIUM ET L’ENVIRONNEMENT

G.1. Quels sont les risques les plus sérieux pour l’environnement
          attribuables à l’exploitation d’une mine d’uranium?
G.2. L’exploitation minière de l’uranium entraîne-t-elle la pollution des eaux?
G.3. Quels sont les dangers posés par les résidus d’uranium
          pour les humains, la faune et l’environnement?
G.4. Existe-t-il des moyens d’éviter ce type de contamination radioactive?
G.5. Pendant combien de temps les résidus seront-ils radioactifs?
G.6. Quans les risques associés aux résidus d’uranium pourront-ils être éliminés?
G.7. Les techniques scientifiques de pointe permettent-elles d’éliminer
          le rayonnement atomique émis par les résidus radioactifs?
G.8. Quels sont les effets à long terme de l’exploitation minière de l’uranium?
          [réponse par Dre Stella Swanson]

H. LA RÉGLEMENTATION DE LA GESTION DES RÉSIDUS

H.1. Qui a la responsabilité de réglementer la gestion des résidus d’uranium au Canada?
H.2. Quelles sont les exigences des règlements en vigueur?
H.3. Les règlements en vigueur sont-ils efficaces?
H.4. Les organismes de réglementation sont-ils indépendants de l’industrie?

J. LES EFFETS DU RAYONNEMENT SUR LA SANTÉ

J.1. Le corps humain peut-il se protéger contre les matières radioactives?
J.2. Comment le rayonnement peut-il causer le cancer?
J.3. Comment le rayonnement peut-il causer des défauts génétiques chez les enfants?
J.4. Comment a-t-on découvert que le rayonnement pouvait causer
          des dommages d’ordre génétique?
J.5. Comment le rayonnement peut-il affecter un enfant en gestation?
J.6. Existe-t-il une cure pour les victimes du rayonnement?
J.7. La radioactivité peut-elle être détectée par les sens?
J.8. L’exposition aux rayons X dans le cadre
          d’examens médicaux/dentaires est‑elle dangereuse?

K. RÉGLEMENTATION DE L’EXPOSITION AU RAYONNEMENT

K.1. Qu’entend-on par niveau « acceptable » d’exposition au rayonnement?
K.2. Qui a la responsabilité de la réglementation
          de l’exposition au rayonnement au Canada?
K.3. Quel est le fondement de l’établissement des normes relatives au rayonnement?
K.4. Qu’est-ce que le « rayonnement de fond »?
K.5. Le rayonnement de fond va-t-il en augmentant?
K.6. Le radon dans les habitations pose-t-il problème?
          Comment s’y introduit‑il?
K.7. Les normes canadiennes relatives à l’exposition au rayonnement
          sont‑elles plus rigoureuses qu’auparavant?

L. RÉFÉRENCES

L.1. L’extraction minière de l’uranium et l’environnement
L.2. L’industrie de l’uranium et la réglementation
L.3. Les résidus d’uranium
L.4. Contexte historique
L.5. Risques pour la santé de l’extraction minière de l’uranium
L.6. Risques pour la santé du rayonnement
L.7. L’uranium et les armes nucléaires
L.8. L’option nucléaire
L.9. Le plutonium et les déchets de haute activité
L.10. Solutions de rechange pour l’énergie nucléaire
L.11. L’uranium et l’intérêt public
L.12. L’extraction minière et les droits de propriété des Autochtones


DES REPONSES AUX QUESTIONS

A. L’URANIUM ET LA RADIOACTIVITÉ

A.1. Qu’est-ce que l’uranium?

L’uranium est le métal le plus lourd que l’on trouve dans la nature. Il s’agit d’un noyau instable qui perd des particules ou « se désintègre », tel qu’indiqué dans la section suivante. On dit de cette matière qu’elle est « radioactive ».

À mesure que l’uranium se désintègre, il émet un « rayonnement » dont la pénétration dépend de l’énergie des particules émises. Il produit également plus d’une dizaine d’autres substances radioactives comme sous‑produits.

Ces sous-produits instables, qui possèdent peu ou pas de valeur commerciale, sont appelés « produits de désintégration de l’uranium ». Ils sont mis de côté et considérés comme des déchets une fois que l’uranium a été extrait du sol. L’un d’eux est un gaz radiotoxique appelé radon. Les autres sont des matières solides radioactives.

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A.2. Qu’est-ce que la radioactivité?

La science nous enseigne que chaque chose est constituée de très petites particules appelées atomes. Celles-ci sont trop petites pour être vues, même à l’aide d’un microscope puissant. Lorsqu’une substance est radioactive, cela signifie que les atomes explosent (à l’échelle inframicroscopique) en émettant des particules avec force. Ce phénomène porte le nom de « désintégration radioactive ».

Durant la désintégration radioactive, deux types de particules porteuses d’une charge électrique sont émises, à grande vitesse. Ce sont les particules alpha et bêta. Certaines matières radioactives sont des émetteurs alpha, alors que d’autres sont des émetteurs bêta. En outre, il arrive souvent qu’un rayonnement hautement énergétique soit émis (rayons gamma). Les rayons gamma ne sont pas des particules, mais une forme d’énergie pure très semblable aux rayons X, qui se propage à la vitesse de la lumière.

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A.3. À quelle profondeur peut pénétrer le rayonnement?

Les rayons gamma traversent les tissus mous comme le fait la lumière à travers une fenêtre. Les particules bêta ont un pouvoir de pénétration moins élevé, et la distance à laquelle ils peuvent pénétrer dans un tissu mou est de moins de deux centimètres. Les particules alpha, quant à elles, ont un pouvoir de pénétration très faible, c’est-à-dire qu’elles ne pénètrent qu’à une profondeur de quelques micromètres dans un tissu mou, ce qui équivaut à quelque diamètres de cellule.

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A.4. La radioactivité est-elle dangereuse?

Les particules alpha, les particules bêta et les rayons gamma peuvent endommager gravement l’ADN des cellules vivantes et ce, de manière anarchique.

Les expositions importantes au rayonnement peuvent entraîner la mort en quelques jours ou             quelques semaines. Des doses plus faibles peuvent causer des brûlures, la perte des cheveux, des nausées, la stérilité et des changements importants dans le sang. Même les très faibles doses, trop petites pour causer des dommages visibles dans l’immédiat, peuvent entraîner un cancer ou une leucémie chez les personnes exposées, des anomalies congénitales chez leurs descendants (y compris des difformités physiques, des maladies et une déficience mentale), et possiblement des défauts génétiques dans les générations suivantes.

À l’extérieur du corps, les émetteurs de particules alpha sont ceux qui causent le moins de dommages, et les émetteurs gamma sont plus dangereux que les émetteurs bêta.

Cependant, à l’intérieur du corps, ce sont les émetteurs alpha qui sont les plus dangereux. Ils sont environ 20 fois plus dommageables que les émetteurs bêta ou gamma. Ainsi, même si le rayonnement alpha ne peut pas traverser une feuille de papier ou une couche de cellules mortes sur la peau, les émetteurs alpha sont extrêmement dangereux lorsqu’ils sont incorporés par inhalation ou par ingestion, ou qu’ils pénètrent dans le corps par une coupure ou une plaie ouverte.

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A.5. Comment un élément radioactif peut-il générer d’autres éléments radioactifs?

Lorsque les atomes subissent la désintégration radioactive, ils se transforment en de nouvelles substances, car ils ont perdu une partie des particules qui les composaient. Ces sous-produits de la désintégration radioactive sont appelés « produits de désintégration », ou « produits de filiation ». Dans de nombreux cas, les produits de désintégration sont également radioactifs. Si c’est le cas, ils se désintégreront à leur tour, produisant encore d’autres produits de désintégration en émettant des rayonnements.

Half-life = demi-vie = la période radioactive où la moitié des atoms se désintègrent

microsec* = microseconde*;     *Microsec :1/1,000,000 of a second = *Microseconde :1/1 000 000 de seconde;

millisec** = milliseconde**       **Millisec :1/1,000 of a second = **Milliseconde : 1/1 000 de seconde

second = seconde;             minute = minute;             3.0 minutes = 3,0 minutes;

hour = heure;                 day = jour;               3.8 days = 3,8 jours;               24.1 days = 24,1 jours;

week = semaine;             year = année;             1,600 years = 1 600 ans;

thousand years = millier d’années;             245,000 years (245 thousand years) = 245 000 ans (245 miller d'années);

million years = million d’années;           billion years = milliard d’années;           4.5 billion years = 4,5 milliards d’années;

Uranium = uranium;           Thorium = thorium;           Protactinium = protactinium;

Radium = radium;               Radon = radon;               Polonium = polonium;

Lead = plomb;                 Bismuth = bismuth;               stable = stable;

Le nombre qui suit le nom d’une substance donne une indication de son rang sur la liste des produits de désintégration. Lorsque le nombre diminue de quatre chiffres, c’est qu’une particule alpha a été émise. Lorsqu’il demeure identique, c’est qu’une particule bêta a été émise. La plupart du temps (mais pas toujours), un rayon gamma accompagne l’émission d’une particule alpha ou bêta.

Ainsi, l’uranium 238 se transforme en thorium 230 (en trois étapes), qui se désintègre ensuite pour donner du radium 226, qui devient ensuite du radon 222. Le nombre diminue, car l’atome perd des particules.

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B. L’URANIUM ET SES UTILISATIONS

B.1. Où trouve-t-on l’uranium?

On trouve de très petites quantités d’uranium presque partout. Cependant, les roches qui contiennent une forme concentrée d’uranium (le minerai) sont plus rares; il s’agit habituellement de roche dure ou de grès. Ces roches sont habituellement recouvertes de terre et de végétation. 

Au Canada (voir la carte ci-après), l’extraction minière de l’uranium se fait essentiellement dans les Territoires du Nord-Ouest (Grand lac de l’Ours et Rayrock), dans le nord de la Saskatchewan (Cluff Lake, Key Lake, Rabbit Lake, lac Wollaston et Uranium City), en Ontario (Elliot Lake et Bancroft) et à quelques autres endroits.

 

Uranium activities in Canada = activités d’extraction minière au Canada

Mine Operating = mine en exploitation

Mine Closed down = mine fermée

Mine Potential = mine potentielle

Refinery Operating =  raffinerie en exploitation

 

Des mines d’uranium sont également exploitées dans le sud-ouest des États-Unis, en Australie, dans certaines parties de l’Europe, en Russie, en Namibie, en Afrique du Sud, au Niger et ailleurs.

Dans les années 1970, des gisements d’uranium ont été découverts en Colombie‑Britannique, en Nouvelle‑Écosse et au Labrador, mais en raison de l’opposition des citoyens, les sociétés minières n’ont pas pu extraire le minerai dans ces régions. 

Au cours des quinze dernières années, la Saskatchewan est devenue la capitale mondiale de l’uranium. C’est en Saskatchewan que l’on a découvert le minerai à plus forte teneur en uranium.

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B.2. Comment le Canada en est-il venu à s’intéresser commercialement à l’uranium?

Avant 1939, on n’utilisait que très peu l’uranium. Les potiers allemands l’utilisaient pour fabriquer une glaçure rougeâtre, et il faisait l’objet d’études par des scientifiques en raison de ses propriétés radioactives. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, des scientifiques se sont rendus compte que l’on pouvait produire des bombes extrêmement puissantes en « divisant » les atomes d’uranium grâce à la fission nucléaire, qui est décrite à la section C.

Lorsque les États-Unis ont eu besoin d’uranium pour construire la première bombe atomique, le Canada a déboursé des sommes importantes afin de rouvrir une mine de radium de propriété privée située dans les Territoires du Nord‑Ouest et d’en exploiter le minerai d’uranium. Le Canada a secrètement acheté des actions de la société Eldorado Mining and Refining, et l’a transformée en société de la Couronne : Eldorado Nucléaire Limitée.

À la raffinerie d’Eldorado située à Port Hope (Ontario), de l’uranium provenant des T. N.‑O. et du Congo a été concentré pour l’armée américaine qui l’a utilisé pour produire les premières bombes atomiques au monde. Ces bombes ont complètement détruit deux villes japonaises à la fin de la guerre en 1945.

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B.3. Quel est le rôle de l’uranium dans les bombes atomiques?

L’explosif contenue dans la bombe d’Hiroshima était de l’uranium sous une forme que l’on trouve seulement en très faible concentration dans chaque échantillon d’uranium. La bombe de Nagasaki était constituée d’une matière nucléaire explosive différente, appelée plutonium. Mais le plutonium – explosif nucléaire le plus couramment utilisé de nos jours – est obtenu à partir de l’uranium. En fait, sans uranium, aucune arme nucléaire comme celles que l’on connaît actuellement ne pourrait être fabriquée.

Pendant les vingt années qui ont suivi les premières explosions atomiques, l’uranium canadien était vendu pour fabriquer d’autres bombes atomique, ainsi que des bombes à hydrogène, qui sont encore plus puissantes (mais qui nécessitent tout de même de l’uranium ou du plutonium comme « amorce »). En 1959, l’uranium venait au quatrième rang des exportations canadiennes les plus importantes, après le papier journal, le bois de sciage et le blé. À ce moment‑là, il était vendu uniquement à des fins militaires.

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B.4. Quel est le rôle de l’uranium dans les réacteurs nucléaires qui produisent de l’électricité?

Dans les années 1960, la fission nucléaire a commencé à être utilisée en vue de produire de l’électricité dans des machines spéciales appelées réacteurs nucléaires. Les réacteurs utilisent l’uranium comme combustible pour faire bouillir l’eau. La vapeur produite active des turbines qui permettent de produire de l’électricité. Il existe actuellement vingt centrales nucléaires au Canada, et il en existe des centaines d’autres dans le monde. Dix‑huit centrales nucléaires sont exploitées en Ontario. On en compte également une au Québec et une autre au Nouveau‑Brunswick.

Depuis l’incident de Three Mile Island en 1979, et en particulier depuis l’accident de Tchernobyl en 1986, presque aucun réacteur nucléaire n’a été vendu. Cependant, en 1990 Ontario Hydro a annoncé qu’elle  voulait en construire une dizaine d’autres.

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B.5. Quelles sont les autres utilisations des réacteurs nucléaires?

Les réacteurs nucléaires qui utilisent l’uranium comme combustible peuvent servir également à produire des substances radioactives artificielles appelées « radioisotopes » utilisés dans l’industrie, en recherche scientifique et en médecine. Ces isotopes radioactifs peuvent également être fabriqués dans des appareils spéciaux appelés « accélérateurs », qui ne nécessitent pas d’uranium.

Les réacteurs nucléaires peuvent également servir à propulser des sous‑marins nucléaires. En outre, certains réacteurs militaires spéciaux sont utilisés pour produire la plupart des matières explosives nucléaires utilisées dans les armes nucléaires.

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B.6. Les utilisations pacifiques et militaires de l’uranium sont‑elles incompatibles?

Les réacteurs nucléaires alimentés à l’uranium génèrent du plutonium comme sous‑produit. Si ce plutonium est chimiquement séparé des autres déchets radioactifs dans le combustible irradié, il peut être utilisé comme matière nucléaire explosive. Ainsi, la répartition de la production d’énergie nucléaire dans de plus en plus de pays ouvre la porte à la production d’armes nucléaires à un certain moment dans le futur.

En 1974, l’Inde a fait exploser une bombe qui contenait du plutonium produit dans un réacteur qui avait été donné au gouvernement indien par le gouvernement canadien. Il ne s’agissait pas d’un réacteur qui produisait de l’électricité, mais d’un réacteur de plus petite taille appelé « réacteur de recherche ».

Le Canada a également donné ou vendu des réacteurs à Taiwan, au Pakistan, à la Corée du Sud, à l’Argentine et à la Roumanie. Plusieurs régimes dans ces pays clients ont montré de l’intérêt pour le développement d’armes nucléaires, ou pour le partage de leur technologie nucléaire avec d’autres pays ayant des ambitions sur le plan militaire (p. ex. l’Iraq et la Libye).

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B.7. Le Canada a-t-il déjà produit du plutonium destiné à la fabrication de bombes?

Durant la Deuxième Guerre mondiale, des scientifiques européens ont travaillé dans un laboratoire très secret de Montréal, payé par le Canada, afin de découvrir la méthode la plus efficace pour produire du plutonium destiné à la bombe atomique. Cela comportait l’utilisation d’une matière particulière appelée « eau lourde ».

En 1944, une décision militaire a été prise à Washington D.C. en vue de construire un ou plusieurs « réacteurs à eau lourde » à Chalk River (Ontario), afin de vérifier les résultats obtenus au laboratoire de Montréal. Lorsque les réacteurs canadiens ont été mis en service après la fin de la guerre, ils se sont avérés être les meilleurs réacteurs producteurs de plutonium au monde. Le réacteur qui a été donné à l’Inde est du même type. 

Pour aider à défrayer les coûts de son programme de recherche nucléaire, le gouvernement du Canada a vendu du plutonium produit dans les réacteurs de Chalk River à la défense américaine, et celle-ci l’a utilisé pour fabriquer des bombes pendant plus de vingt ans. Le plutonium de Chalk River a été envoyé au Royaume-Uni pour aider les Britanniques à mettre au point leur première bombe atomique. Les Britanniques ont également appris comment séparer le plutonium en vue de l’utiliser à des fins militaires en construisant une usine de séparation à Chalk River, en collaboration avec des scientifiques canadiens. Des scientifiques français qui oeuvraient au laboratoire de Montréal ont également appris des leçons valables qui les ont aidés à mettre au point les premières armes nucléaires françaises.

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B.8. Le Canada continue-t-il à vendre de l’uranium et du plutonium destiné à la fabrication de bombes?

Depuis 1965, le Canada a une politique de vente d’uranium à des fins pacifiques seulement – c’est‑à‑dire comme combustible dans des réacteurs nucléaires. Tout pays qui achète de l’uranium canadien ou un réacteur nucléaire canadien doit s’engager à ne pas les utiliser (ou à ne pas utiliser les sous‑produits, comme le plutonium) pour fabriquer des bombes. Cette politique est assortie du Traité sur la non‑prolifération des armes nucléaires (TNP). Cependant, comme l’indique l’expérience indienne, la politique ne peut pas être mise en application : lorsqu’un pays choisit de fabriquer des bombes, le Canada ne peut rien faire pour l’en empêcher.

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B.9. L’uranium canadien entre-t-il encore dans la fabrication de bombes nucléaires?

Plus de 85 pour cent de l’uranium canadien est exporté. Dans la plupart des cas, avant d’être envoyé à ses clients de l’étranger, il doit d’abord être traité dans une usine d’enrichissement, habituellement aux États-Unis ou en Russie. Pour sept livres d’uranium qui entrent dans l’usine d’enrichissement, on obtient moins de une livre de produit fini : ce produit fini est le combustible destiné au réacteur. Les six autres livres ont rejetées comme déchet et n’ont pas d’usage civil important.

Une partie de cet uranium mis de côté, appelé « uranium appauvri », a été régulièrement utilisé par la défense américaine dans la construction d’armes nucléaires. En fait, c’est la matière brute à partir de laquelle le plutonium de qualité militaire est produit dans des réacteurs militaires spéciaux.

conteneurs d’uranium appauvri                   « mires » faites à partir d’uranium appauvri

Les résidus de l’enrichissement de l’uranium 
seront utilisés pour produire du plutonium
entrant dans la fabrication de bombes

photos de Robert Del Tredici


L’uranium appauvri entre également dans la fabrication de composants métalliques faisant partie de la bombe elle-même, ce qui double par conséquent la puissance de chaque tête explosive. La défense américaine ne fait pas de distinction entre l’uranium appauvri d’origine canadienne et l’uranium appauvri qui vient d’ailleurs.

Lorsque l’uranium canadien a été enrichi en Union soviétique, le Canada n'a pas permis que l’Union soviétique conserve l’uranium appauvri à l’intérieur de ses frontières à cause du potentiel militaire qu’il représente. 

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B.10. Existe-t-il d’autres utilisations de l’uranium?

Il existe d’autres utilisations de l’uranium, mais elles sont moins importantes. Certaines munitions sont revêtues d’uranium, ce qui leur permet de pénétrer plus profondément dans les corps lourdement blindés. De l’uranium appauvri est utilisé comme armure sur certains chars d’assaut, ce qui les rend plus résistants. L’uranium est également utilisé comme contrepoids dans certains avions et dans les missiles Cruise testés dans le nord du Canada.

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C. L’URANIUM ET LA FISSION NUCLÉAIRE

C.1. Qu’est-ce que la fission nucléaire?

La fission nucléaire a été découverte par des scientifiques allemands en 1939. Ils ont découvert que certains atomes d’uranium pouvaient se scinder (ou se « diviser ») en deux ou trois fragments lorsqu’ils étaient bombardés par de petits projectiles appelés « neutrons ».

Lorsque la fission se produit, une grande quantité d’énergie est libérée et d’autres neutrons sont émis avec force. Ces neutrons additionnels frappent d’autres noyaux d’uranium qui se divisent sous l’impact, et encore plus d’énergie et de neutrons sont libérés. C’est ainsi qu’une seule fission peut être à l’origine d’une « réaction en chaîne ».

Le phénomène de fission fait de l’uranium un explosif qui présente de l’intérêt dans une arme nucléaire, ou comme combustible dans un réacteur nucléaire. Dans une bombe atomique, la fission survient de manière non contrôlée, ce qui cause une gigantesque explosion. Dans une centrale nucléaire, le processus de fission est minutieusement contrôlé, en vue de produire de l’électricité de manière continue. Contrairement à la désintégration radioactive, le processus de fission peut être amorcé ou arrêté, accéléré ou ralenti, grâce à des matières spéciales qui absorbent les neutrons.

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C.2. Que sont les produits de fission?

Tous les fragments d’atomes d’uranium issus de la fission sont des atomes d’éléments radioactifs appelés « produits de fission ». Ce ne sont pas des produits de la désintégration de l’uranium dont nous avons parlé précédemment; ce sont plutôt de nouveaux éléments radioactifs que l’on ne trouve pas à l’état naturel.

Il existe des dizaines de produits de fission différents, y compris le strontium 90, le césium 137 et l’iode 131. Ceux‑ci sont plus légers que l’uranium, car les atomes qui les composent sont beaucoup plus petits que les atomes d’uranium. Ils émettent un rayonnement bêta ou gamma, mais pas de particules alpha.

Avant la première explosion de bombe atomique, il n’y avait jamais eu de produits de fission dans l’alimentation humaine, l’air ou l’eau. Aujourd’hui, ces produits sont présents sur toute la surface de la terre, en petites quantités. Chacun d’eux se comporte différemment dans le corps. Ils sont tous dangereux.

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C.3. Qu’est-ce que le strontium 90? Le césium 137?

Le strontium 90 et le césium 137 sont les deux produits de fission les plus dangereux produits dans un réacteur ou libérés suite à une explosion nucléaire. 

Le strontium 90 se comporte sensiblement comme le calcium et se fixe ainsi sur les os et les dents lorsque l’on consomme des aliments ou des boissons contaminés (comme le lait). Le rayonnement émis par le strontium 90 perturbe la moelle osseuse et le sang, ce qui rend la personne plus vulnérable aux maladies infectieuses. Il peut également causer des maladies graves du sang et des os, y compris des cancers.

Le césium 137 se fixe dans la chair des poissons et des animaux. Si les niveaux de contamination dépassent un certain seuil, alors la viande est impropre à la consommation humaine. Le césium 137 se fixe également sur le sol et sur les bâtiments. Si les niveaux de contamination dépassent un certain seuil dans les terres agricoles, les plantes en cours de croissance pourraient ne pas pouvoir être récoltées, et dans certains cas des régions entières pourraient devenir inhabitables. C’est pourquoi de nombreux villages près de Tchernobyl ont dû être abandonnés. C’est également la raison pour laquelle les Lapons ont dû cesser de consommer de la viande de renne.

Dans l’Arctique canadien, on trouve davantage de strontium 90 et de césium 137 dans le corps des caribous que dans celui d’autres animaux d’Amérique du Nord, car les caribous se nourrissent de lichen qui capte les matières radioactives directement dans l’air. Le césium 137 se concentre également dans la chair des poissons. Les Inuits du Canada, qui se nourrissent de viande et de poissons, possèdent des niveaux de radioactivité incorporée issue des retombées radioactives qui sont plus importants que chez les autres personnes vivant en Amérique du Nord. Ces niveaux diminuent graduellement depuis les années 1960, depuis que les gouvernements ont cessé de faire des essais de bombes nucléaires dans l’atmosphère. Cependant, l’accident de Tchernobyl a entraîné une légère augmentation des cas.

Une fois qu’ils sont répartis dans l’environnement, le strontium 90 et le césium 137 demeurent dangereux pendant des décennies. Une partie pour mille subsiste encore après 300 ans.

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C.4. Qu’entend-on par « retombées radioactives des armes nucléaires »?

Lorsqu’une bombe atomique explose dans l’atmosphère, les produits de fission se dispersent dans l’environnement. Ils contaminent l’air, l’eau et le sol, ainsi que les plantes et les animaux. Certains d’entre eux se fixent sur des particules de poussières et des gouttelettes d’eau et retombent sous forme de pluie ou de neige. Certains se retrouvent dans la stratosphère; ils redescendent très lentement pendant de nombreuses années par la suite, sur l’ensemble du globe, et l’on parle alors de « retombées » radioactives.

Si l’explosion de la bombe a lieu au niveau du sol, de grandes quantités de terre sont déplacées. Une bonne partie de ces matériaux, à l’origine non radioactifs, le deviennent à cette occasion car ils absorbent le rayonnement neutronique ambiant issu du processus de fission. Ces nouvelles substances radioactives, créées suite à l’absorption de neutrons, ne sont pas des produits de fission : ce sont des « produits d’activation ». Ils peuvent contribuer fortement aux retombées suite à une explosion atomique.

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C.5. Que sont les « déchets radioactifs de haute activité »?

Les réacteurs nucléaires produisent de grande quantités de produits de fission. Ceux-ci ne se dispersent pas habituellement dans l’environnement, sauf dans le cas d’un accident comme celui qui s’est produit à Three Mile Island en 1979, ou pire, comme l’accident catastrophique de Tchernobyl survenu en 1986.

Moins de quatre pour cent des produits de fission qui étaient contenus à l’intérieur du réacteur de Tchernobyl s’en sont échappés – cependant, les retombées radioactives ont eu des répercussion partout dans le monde. Quatre ans après l’accident, en 1990, des rennes en Scandinavie et des moutons au pays de Galles étaient encore jugés impropres à la consommation humaine à cause du fait qu’ils étaient contaminés par du césium 137 libéré lors de l’accident de Tchernobyl.


Carcasses de rennes de Laponie (Suède)
ayant été contaminés par des retombées radioactives
suite à l’accident nucléaire de Tchernobyl –
ils sont impropres à la consommation humaine.

photo de Robert Del Tredici


S’il n’y a pas d’accident ni de fuites, les produits de fission demeureront à l’intérieur du combustible d’uranium irradié. Même de cette façon, le rayonnement gamma émis est si intense qu’une personne se trouvant à une distance de un mètre environ d’une grappe de combustible irradié non blindée sortant du réacteur recevrait une dose mortelle de rayonnement en moins d’une minute. 

Le combustible nucléaire irradié est trop fortement radioactif pour être manipulé par l’homme; il faut le déplacer à l’aide d’équipement robotique. Le combustible est expédié dans des châteaux de transport spéciaux pesant plus de 50 tonnes fixés à l’aide de chaînes à des camions à plateforme ou dans des wagons de train. Ces « déchets hautement radioactifs » demeurent inapprochables pendant des siècles (en raison du rayonnement gamma émis par les produits de fission) et leur toxicité demeure élevée pendant des centaines de milliers d’années (à cause du rayonnement alpha émis par le plutonium et les autres éléments transuraniens).

Cela prendrait deux fois la quantité d’eau contenue dans tous les lacs et toutes les rivières du globe pour diluer le combustible nucléaire irradié dont on dispose actuellement au niveau maximal admissible de pollution radioactive pour l'eau potable. Par conséquent, les matériaux doivent être stockés de manière sûre dans des systèmes de confinement pratiquement parfaits. Cependant, il n’existe pas encore de méthode sûre pour l’évacuation permanente des déchets radioactifs de haute activité.

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C.6. Comment le plutonium et les autres éléments transuraniens sont‑ils produits?

Même si le plutonium est un sous-produit indirect du processus de fission, ce n’est pas un produit de fission. À l’intérieur du réacteur, certains atomes d’uranium contenus dans le combustible se « transforment » graduellement en atomes de plutonium lorsqu’ils absorbent des neutrons sans se scinder en fragments.

quand une atome d’uranium-238
est frappé par une neutron
il devient une atome d'uranium-239 ,
qui se désintègre en émettant une particule béta
se transformant dans une atome de neptunium-239;
celui-ci se désintègre en émettant une autre particule béta
se transformant finalement dans une atome de plutonium-239.

 

 

Comme il est plus lourd que l’uranium, le plutonium, qui est un radio‑élément artificiel, est appelé élément « transuranien ».

La capture de neutrons additionnels donne lieu à d’autres éléments transuraniens, comme le neptunium, l’américium, le curium et le californium. La plupart d’entre eux, y compris le plutonium, continueront d’émettre un rayonnement alpha pendant des siècles, ou même des millénaires.

Le plutonium est l’une des substances artificielles les plus toxiques qui soient. Quelques milligrammes de poussière de plutonium inhalés, bien qu’ils soient invisibles à l’œil nu, entraîneront la mort en très peu de temps suite à une fibrose massive des poumons. Quelques microgrammes (mille fois moins!) pourraient causer un cancer du poumon dix ou vingt ans après l’exposition.

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C.7. À quoi sert le plutonium?

Le plutonium, comme l’uranium, peut subir la fission nucléaire. C’est pourquoi on l’utilise comme explosif nucléaire ou comme combustible dans un réacteur nucléaire.

Comme nous l’avons mentionné plus tôt, la bombe de Nagasaki contenait du plutonium. Pour des raison techniques, il est plus facile d’utiliser du plutonium plutôt que de l’uranium comme explosif nucléaire. En fait, la plupart des têtes explosives de l’arsenal nucléaire mondial utilisent du plutonium comme explosif primaire.

Le plutonium peut également être utilisé comme combustible dans un réacteur nucléaire. Une partie de l’énergie électrique produite dans une centrale nucléaire vient de la fragmentation des atomes de plutonium, mais il subsiste une quantité importante de plutonium non utilisé dans le combustible nucléaire irradié. Si la production d’énergie nucléaire devient une source d’énergie importante dans le futur, le plutonium sera certainement utilisé plutôt que l’uranium comme combustible nucléaire, parce que les réserves d’uranium ne devraient pas dépasser les réserves de pétrole. Toutefois, pour extraire le plutonium du combustible irradié, il faut d’abord dissoudre le combustible dans de l’acide nitrique en ébullition, ce qui libère des vapeurs et des gaz radioactifs, générant ainsi des millions de gallons de déchets liquides hautement radioactifs.

On a beaucoup parlé des dangers que présente l’utilisation du plutonium comme combustible, en partie à cause de sa toxicité hors du commun, mais aussi à cause des dangers inhérents au procédé d’extraction du plutonium à partir du combustible irradié, et à cause de la menace nucléaire. Les criminels et les terroristes, ainsi que les chefs d’État irresponsables pourraient utiliser le plutonium en vue de fabriquer des armes nucléaires puissantes relativement aisément.

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D. L’URANIUM ET L’INTÉRÊT PUBLIC

D.1. La production d’énergie électrique d’origine nucléaire est‑elle inévitable? Est-ce seulement une question de temps?

Les promoteurs du nucléaire disent que les seules solutions de remplacement pour les réserves de pétrole qui diminuent rapidement sont le charbon et l’uranium. Comme le charbon n’est pas considéré comme étant un combustible « propre », on dit que l’énergie nucléaire demeure la meilleure option. Mais certains sont en désaccord et estiment que les centrales nucléaires ne peuvent pas remplacer le pétrole parce qu’il est long et coûteux de les construire. De plus, les centrales nucléaires ne fournissent que de l’électricité, alors que 85 pour cent de nos besoins en énergie ne sont pas liés à l’énergie électrique.

De nombreuses études réalisées à travers le monde – dont le rapport de la coalition Energy Future (issu du rapport du groupe d’étude sur les économies d’énergie de la Harvard Business School) et le rapport intitulé 2025: Soft Energy Futures for Canada présument que nous pouvons vivre facilement sans utiliser davantage d’énergie nucléaire, de pétrole ou de charbon, en investissant dans l’efficacité énergétique, la conservation de l’énergie et les formes d’énergie renouvelable. Selon ces études, nos besoins devraient pouvoir être entièrement comblés grâce à des technologies telles le chauffage à l’énergie solaire, les biocombustibles renouvelables (méthane, alcool combustible), l’électricité solaire, l’énergie éolienne, l’énergie géothermique, l’énergie thermique des océans, l’énergie marémotrice, etc.


Cette figure est tirée d’un ouvrage d’Amory Lovins intitulé Soft Energy Paths, qui met en opposition deux politiques énergétiques radicalement différentes – les stratégies concurrentes sont essentiellement destinées à répondre aux mêmes types de besoins en énergie, dans les domaines suivants : chauffage, éclairage, transports, puissance de commande, télécommunications, etc.

 

An illustrative, Schematic Future for U.S Gross Primary Energy Use
= Schéma de la consommation d’énergie primaire à l’état brut aux États-Unis

QUADS means QUADRILLION (1015) BTUs PER YEAR* = QUAD. indique QUADRILLION (1015)  DE BTU PAR ANNÉE*

*OR QUINTILLION (1018) JOULES PER YEAR = *OU QUINTILLION (1018) DE JOULES PAR ANNÉE

THE HARD PATH = LA VOIE DURE;       THE SOFT PATH = LA VOIE DOUCE;

OIL AND GAS = PÉTROLE ET GAZ

COAL = CHARBON

NUCLEAR = NUCLÉAIRE

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D.2. Les solutions de rechange de l’énergie nucléaire sont‑elles réalisables?

Grâce aux améliorations sur le plan de l’efficacité énergétique seulement, dont il est fait mention dans ces études, nous pouvons tirer davantage d’énergie que ce qui est produit actuellement par les centrales nucléaires. De plus, le coût de ces mesures d’efficacité est moins élevé que celui de l’énergie nucléaire produite par les centrales nucléaires, et elles créent davantage d’emplois. Elles permettent de réduire les émissions acides et les émissions de gaz à effet de serre plus rapidement que ne pourrait le faire le recours au nucléaire. Elles permettent de répondre aux mêmes besoins énergétiques (chauffage, éclairage, transport) tout en utilisant beaucoup moins d’énergie. L’énergie ainsi « économisée » peut alors être utilisée à d’autres fins. 

Selon ces études, une fois que la demande a été ajustée grâce à l’efficacité (en faire plus avec moins) et à la conservation (élimination des utilisations inutiles), les sources d’énergie renouvelable peuvent satisfaire à presque tous nos besoins réduits en énergie. De façon générale, les technologies d’énergie renouvelables sont considérées à tort comme étant plus coûteuses que l’énergie nucléaire, bien qu’elles soient plus rapides à obtenir, plus propres, plus facilement durables et qu’elles créent davantage d’emplois. Il existe également des technologies utilisant les combustibles fossiles d'une manière plus efficace et plus propre qui peuvent être utilisées durant la période de transition relativement courte qui nous mènera à une société utilisant des technologies durables alimentées grâce à des formes d’énergie renouvelables.

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D.3. L’uranium et l’énergie nucléaire sont-ils acceptés au Canada? Dans le monde?

La population canadienne et la population mondiale sont divisées en ce qui a trait aux mérites de l’uranium et de la technologie nucléaire. La plupart des Canadiens et des Américains s’opposent au nucléaire en raison du problème non résolu de la gestion des déchets et de son lien avec les armes nucléaires. 

Depuis l’accident de Three Mile Island en 1979, aucun réacteur nucléaire n’avait été vendu dans toute l’Amérique du Nord en septembre 1990. Depuis l’accident de Tchernobyl en 1986, des millions d’Européens et de citoyens soviétiques se sont ligués contre la production d’énergie nucléaire. La Suède, l’Autriche, l’Allemagne, la Belgique et les Philippines comptent parmi les pays qui ont décidé d’éliminer progressivement la production d’énergie nucléaire.

Lorsque Margaret Thatcher a privatisé l’électricité britannique en 1989, elle a été incapable de persuader les investisseurs privés de industrie d’acheter les centrales nucléaires. Les acheteurs ont hésité lorsqu’ils ont appris combien coûterait l’évacuation des déchets radioactifs et le démantèlement des structures radioactives une fois que les réacteurs auront atteint la fin de leur vie utile.

Contrairement aux autres pays, la France élargit son programme nucléaire – mais les Français refusent de séparer leur programme nucléaire civil de leur programme d’armes nucléaires.

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D.4. Dans quelle mesure le Canada a-t-il investi dans l’uranium et l’énergie nucléaire?

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, le Canada a dépensé davantage sur son programme d’armes nucléaires que dans toutes les autres sphères de la R-D scientifique. Après la guerre, Ottawa a décidé d’explorer d’autres possibilités de la technologie nucléaire dans le domaine civil. Selon une étude préparée pour le Conseil économique du Canada, près de 18 milliards de dollars (en dollars de 1990) ont été dépensés pour le développement de l’option de la production d’énergie nucléaire.

Les subventions fédérales continuent d’être aussi importantes à l’heure actuelle. Le financement de la recherche a toujours été plus important pour l’énergie nucléaire que pour toutes les autres options énergétiques combinées (pétrole, gaz, hydro-électricité, conservation de l’énergie, formes d’énergie renouvelables), même si l’énergie nucléaire ne représente que 3,3 pour cent de l’énergie produite au Canada.

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D.5. Dans quelle mesure le Canada est-il intervenu sur le marché de l’uranium?

Le gouvernement fédéral a eu le monopole de l’extraction minière, de la concentration et du raffinage de l’uranium jusqu’au milieu des années 1950; par la suite, les entreprises privées ont eu l’autorisation d’investir. Dans les années 1960, lorsque les contrats militaires ont pris fin, le premier ministre Lester Pearson (député de Elliot Lake) a commencé à accumuler des stocks d’uranium, aux dépens des contribuables, afin d’éviter que les deux mines de propriété privée d’Elliot Lake ne fassent pas faillite. En 1965, Pearson a promis en Chambre que, dorénavant, l’uranium canadien serait vendu à des fins pacifiques seulement.

Au début des années 1970, le cabinet Trudeau a participé à l’établissement d’un cartel de fixation des prix de l’uranium en collaboration avec l’Afrique du Sud, l’Australie, la France et le conglomérat d’extraction minière britannique Rio Tinto Zinc. Le cartel a utilisé des quotas secrets et des invitations à soumissionner fictives pour faire monter les prix mondiaux en violation apparente des lois canadiennes et internationales. Lorsque les prix ont monté en flèche, le Canada a financé un programme de reconnaissance de l’uranium ambitieux visant à aider les sociétés minières à localiser et à exploiter des réserves récupérables sur le plan économique. Dans l’intervalle, Ottawa a continué à posséder et à exploiter la plus grande raffinerie d’uranium au monde (située à Port Hope), par le biais d’Eldorado Nuclear Limitée.

Les opposants à l’industrie du nucléaire soutiennent que le public canadien aurait été mieux servi si les recettes fiscales et la volonté politique qui étaient consacrées à la production d’énergie nucléaire et à l’uranium avaient été plutôt consacrées à des technologies énergétiques.

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D.6. Quel est le statut actuel du Canada sur le marché international de l’uranium?

Le Canada a été le premier pays à procéder à l’extraction du minerai d’uranium et au raffinage à grande échelle, et il demeura le chef de file mondial incontesté sur le plan des exportations d’uranium jusqu'en 2009. Le Kazakhstan est maintenant le premier exportateur d'uranium.

Pendant environ 25 ans, à partir du milieu des années 1950, les États-Unis étaient les premiers producteurs mondiaux d’uranium, alors que le Canada demeurait le chef de file au niveau des exportations. Au cours des années 1980, le Canada est devenu le plus grand producteur au monde, principalement en raison de la présence de gisements d’uranium à très forte teneur sur son territoire, en particulier dans le nord de la Saskatchewan. Ce minerai coûtait beaucoup moins cher à extraire que le minerai classique. Mais depuis 2009 le Kazakhstan est devenu le plus grand producteur d'uranium.

Quelques années après la dissolution du cartel de fixation des prix de l’uranium, le prix de ce métal sera en chute libre de la fin des années 1970, jusqu'en 2006. En fait, en 1990, le prix de l’uranium a descendu à un niveau jamais vu auparavant. Les producteurs d’uranium aux États-Unis et ailleurs dans le monde, y compris à Elliot Lake, ont été forcés de fermer les mines, car ils n’étaient plus en mesure de concurrencer le bas prix de l’uranium extrait en Saskatchewan.

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D.7. Pourquoi est-ce que l’extraction minière de l’uranium est en expansion au Canada?

On ne sait pas exactement pourquoi les activités d’extraction minière de l’uranium au Canada connaissent une progression, alors que le prix de l’uranium est bas et que le marché est au ralenti. Les investisseurs dans les ressources canadiennes d’uranium sont pour la plupart des entreprises de l’étranger qui sont intéressées à accumuler des stocks d’uranium canadien obtenu à bon prix. En attendant, aucune somme n’est mise de côté dans le but de réparer les dommages graves ayant été causés à l’environnement à cause des activités d’extraction minière de l’uranium réalisées antérieurement, ou dans le but d’évacuer les centaines de millions de tonnes de déchets radioactifs produits par les mines d’uranium abandonnées et par les usines de concentration.

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D.8. Y a-t-il des conséquences sur les droits de propriété des Autochtones? [Dr Jim Harding]

Les mines d’uranium au Canada sont, pour la plupart, situées dans des régions traditionnellement occupées par les peuples autochtones, sur des terres qu’ils continuent de revendiquer. Même lorsqu’il existe des traités (en Ontario et en Saskatchewan), les communautés autochtones croient qu’elles ont pleinement le droit de s’opposer ou non aux activités d’extraction minière et, à tout le moins, elles estiment pouvoir être dédommagées en recevant une compensation (comme un partage des recettes) dans les cas où l’extraction minière aurait lieu. Au Canada, il n’existe aucune disposition légale en ce qui a trait à de telles compensations.

Les Inuits de la région de Keewatin dans la partie est de l’Arctique (région ne faisant pas l’objet de traités) estiment que la prospection d’uranium sur des terres où ils ont chassé le caribou pendant plusieurs centaines d’années contrevient à leurs droits. Malgré une décision judiciaire d’une cour fédérale en 1979 qui présumait la légalité de l’exploration d’uranium dans la région, la communauté autochtone a rejeté l’argument du gouvernement fédéral voulant que les Inuits n’avaient aucun droit ancestral relativement aux activités se déroulant dans cette région. Des jugements ultérieurs (notamment la décision Sparrow en 1990, qui est une décision de la Cour suprême du Canada) ont reconnu les droits ancestraux des peuples autochtones du Canada.

Dans différentes conventions internationales, les droits de propriété des collectivités autochtones concernant des terres qu’ils occupent sont explicitement reconnus. Les sociétés d’extraction minière d’uranium basées à l’étranger qui exploitent des mines au Canada en vertu d’un permis octroyé par le gouvernement du Canada font souvent une entaille à ces droits de propriété sur des terres visées ou non par des traités, parfois avec l’approbation de leurs gouvernements. Le gouvernement allemand, par exemple, a refusé de ratifier une convention de ce genre parce qu’il n’existait aucun peuple autochtone, tel que défini dans ladite convention, qui vivait dans la République fédérale allemande.

La reconnaissance des droits des Autochtones qui vivent dans le nord de la Saskatchewan (endroit où se trouvent les plus grandes mines d’uranium au monde) a été assurée par des demandes d’information publiques sur l’extraction minière de l’uranium dans la province pendant les années 1970. Néanmoins, la commission d’enquête de Cluff Lake a recommandé la création de la Northern Development Board pour assurer aux peuples autochtones un meilleur contrôle sur l’extraction minière de l’uranium dans le nord de la Saskatchewan. La recommandation n’a pas été mise en œuvre.

Selon au moins un expert juridique (Bartlett), « La poursuite des activités de prospection d’uranium représente une abnégation non justifiée des droits de propriété des Autochtones, sans aucune compensation. ».

L’examen, par le BFEEE (Bureau fédéral d’examen des évaluations environnementales) de la mine d’uranium Kiggavik proposée située près de Baker Lake (T. N.‑O) ne tient pas compte non plus des droits des Autochtones. La mine Kiggavik est proposée par Urangesellschaft, une société minière d’extraction d’uranium dont le siège social est en Allemagne.

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E. RISQUES POUR LA SANTÉ DE L’EXTRACTION MINIÈRE DE L’URANIUM

E.1. Quels sont les risques pour la santé de l’extraction minière de l’uranium?

L’extraction minière de l’uranium est une activité dangereuse. En plus de risques habituels associés à l’extraction minière, les travailleurs des mines d’uranium partout dans le monde sont exposés au rayonnement, et l’incidence du cancer du poumon et d’autres maladies pulmonaires chez ces travailleurs est beaucoup plus élevée. Plusieurs études démontrent également une incidence plus élevée des cancers de la peau et de l’estomac, et des maladies rénales parmi les travailleurs des mines d’uranium.

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E.2. Depuis quand sait-on que le cancer du poumon peut être causé par l’exposition au rayonnement dans les mines d’uranium?

Pendant près de quatre siècles, depuis 1546, on a signalé de nombreux cas de travailleurs de mine souterraines à Schneeburg (Allemagne) qui mouraient des suites de maladies pulmonaires mystérieuses. En 1879, on a démontré que près des trois quarts d’entre eux étaient décédés de cancer du poumon, et de nombreux autres de diverses maladies pulmonaires.

Avant 1930, les mêmes statistiques étaient rapportées pour les travailleurs de la mine de Joachimsthal (Tchécoslovaquie) sur l’autre versant de la même chaîne de montagne. Plus de la moitié d’entre eux sont décédés d’un cancer du poumon. Parmi les populations qui ne comptaient pas de travailleurs de mine à la fois du côté allemand et du côté tchèque de la chaîne de montagne, le cancer du poumon était pratiquement inexistant. 

La teneur en uranium du minerai en question était particulièrement élevée. Les travailleurs qui ont extrait d’autres types de minerai n’ont pas connu d’aussi nombreux cas de cancer du poumon que les travailleurs des mines d’uranium.

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E.3. Comment avons-nous appris que la radioactivité pouvait causer le cancer du poumon?

En 1897, on a appris que le minerai d’uranium était radioactif. Avant 1900, on avait découvert que des dommages graves peuvent être causés à la peau par suite d’un contact prolongé avec certains produits de désintégration radioactifs de l’uranium. Avant 1920, il était déjà clairement établi que l’exposition chronique au rayonnement, même si elle ne causait pas de dommages visibles à la peau ou à d’autres tissus corporels, pouvait entraîner un cancer ou une leucémie, plusieurs années après l’exposition, à la fois chez l’humain et chez les animaux. 

Dans les années 1930, les scientifiques étaient convaincus que les nombreux cas de cancer du poumon qui avaient été signalés chez les travailleurs de mine allemands et tchèques avaient été causés par le fait que ces hommes inhalaient des matières radioactives en suspension dans l’air des mines souterraines. Quelques décennies plus tard, on pouvait constater que les survivants des bombes atomiques au Japon présentaient des taux de cancer du poumon beaucoup plus élevés que d’autres groupes de la population.

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E.4. Quelles sont les matières radioactives susceptibles de causer le cancer du poumon chez les travailleurs de mines?

Avant la Deuxième Guerre mondiale, on savait déjà que c’était le radon (qui se présente sous forme gazeuse), plutôt que la poussière de minerai d’uranium, qui était la cause du cancer du poumon chez les travailleurs de mines souterraines. Cette conclusion a été tirée en comparant les travailleurs de mines et d’autres travailleurs qui respiraient des poussières radioactives mais qui n’avaient presque pas de cancer du poumon. Cela a été confirmé par des expériences réalisées sur des animaux.

Des scientifiques étaient confondus par le fait que le radon, gaz émetteur de particules alpha, était un agent cancérigène plus important que les autres émetteurs alpha. Il semblait en effet être beaucoup plus dommageable que d’autres émetteurs alpha comme ceux que l’on trouve dans la poussière de minerai. Le mystère a plané pendant plus d’une décennie.

Dans les années 1950, le mystère a été partiellement élucidé lorsque l’on a démontré que le radon, stationnaire dans l’air ambiant des mines, est à l’origine de produits de désintégration radioactive appelés « produits de filiation du radon »). Ces sous‑produits radioactifs solides demeurent en suspension dans l’air, tout comme le radon. Lorsque le radon est inhalé, les produits de filiation le sont eux aussi, ce qui donne lieu à une dose de rayonnement alpha aux poumons beaucoup plus importante que la dose qui serait reçue suite à l’inhalation du gaz seulement.

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E.5. Les travailleurs des mines d’uranium d’Amérique du Nord ont-ils été plus nombreux que d’autres à souffrir d’un cancer du poumon?

Lorsque l’extraction minière de l’uranium a commencé au début des années 1940, d’abord en vue d’assurer l’approvisionnement en uranium destiné à la fabrication de bombes, et plus tard pour alimenter les réacteurs nucléaires, la preuve présentée par les cas de Schneeberg et de Joachimsthal a été ignorée. Aux États-Unis, les indiens Navaho étaient envoyés dans les mines d’uranium du Colorado et exposés à des niveaux de radon (gaz et produits de filiation) aussi élevés que ceux enregistrés dans les mines allemandes et tchèques, avec des résultats tout aussi dévastateurs. Au Canada, de nombreux décès par cancer du poumon ont été constatés chez les travailleurs de mines de fluorine à Terre‑Neuve, qui avaient commencé à travailler dans les années 1930, ainsi que chez les travailleurs des mines d’uranium des Territoires du Nord‑Ouest. En Saskatchewan et en Ontario, les travaux d’extraction minière avaient débuté dans les années 1940 et 1950. Bien que l’exposition au rayonnement dans les mines canadiennes a été moins importante que dans les mines américaines, des augmentations importantes des décès par cancer y ont été observées. 

L’uranium n’est pas présent tel quel dans les mines de fluorine de Terre‑Neuve, mais des niveaux élevés de radon sont dissous dans l’eau qui suinte dans ces mines. Ce gaz est mortel lorsqu’il est inhalé par des travailleurs de mines, et bon nombre d’entre eux sont morts suite à l’exposition au radon. 

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E.6. Aujourd’hui, les taux de cancer du poumon chez les travailleurs de mines d’uranium sont-ils plus élevés qu’autrefois?

En 1976, une commission royale de l’Ontario – la Commission Ham – a déterminé que 81 travailleurs de mines d’uranium canadiennes étaient morts du cancer du poumon. C’était deux fois plus que ce à quoi on s’attendait. À la fin de 1977, on en comptait 119; à la fin de 1981, 174; et à la fin de 1984, ce nombre avait atteint 274. Dans un rapport de 1980 de la British Columbia Medical Association, on a expliqué que l’on doit s’attendre à une « intensification du nombre de cancers induits par le rayonnement » chez les travailleurs de mines d’uranium. De nombreuses études en cours sur les travailleurs des mines en roche dure exposés au radon et à ses produits de filiation montrent qu’en Europe, aux États-Unis et au Canada, les taux de cancer du poumon sont en nette progression. Le nombre de cas de cancer dépend de l’exposition au rayonnement des travailleurs de mines; plus l’exposition est élevée, plus le nombre de décès par cancer est élevé. L’augmentation importante des cancers du poumon causés par le rayonnement a été observée à la fois chez les fumeurs et chez les non‑fumeurs.

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E.7. Les niveaux actuels d’exposition au rayonnement des travailleurs de mines sont-ils considérés comme étant sûrs?

Il n’existe pas de preuve scientifique à l’effet qu’il y ait un niveau d’exposition au radon qui soit sûr. Presque tous les résultats de recherche laissent supposer le contraire. La seule hypothèse prudente à ce sujet est que toute exposition au radon risque d’entraîner une augmentation proportionnelle de l’incidence des cas de cancer du poumon. Cette conclusion ressort de tous les rapports importants sur le sujet depuis la fin des années 1970.

Au début des années 1980, une étude scientifique indépendantes sur les risques présentés par le radon a été publiée par la Commission de contrôle de l’énergie atomique (CCEA – organisme qui fixait à l’époque les normes de l’exposition au rayonnement au Canada). Cette étude, connue sous le nom de rapport Thomas/MacNeill, a examiné toutes les preuves disponibles dans plusieurs pays. Elle conclut que les risques sont très élevés.

Selon le rapport Thomas/MacNeill, si les travailleurs des mines d’uranium étaient exposés au niveau d’exposition maximal admissible de la CCEA pendant une vie entière, il est probable que l’incidence du cancer du poumon serait quatre fois plus élevée. Plutôt que 54 cancers du poumon pour 1000 hommes, qui est la moyenne en Ontario, il y aurait près de 200 cancers du poumon pour 1000 hommes – c’est‑à‑dire un sur cinq.

Dans le rapport de la British Columbia Medical Association (BCMA) publié en 1980, dont nous avons déjà parlé, on affirme que la CCEA « n’est pas apte à réglementer » à cause des risques pour la santé qu’elle tolère. Aucune autre industrie, explique-t-on dans le rapport de la BCMA, ne tolérerait la présence d’une substance cancérigène dans un lieu de travail en une concentration proche du double de la dose admissible causant un cancer chez l’humain.

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E.8. Les dangers pour la santé peuvent-ils être limités en faisant travailler davantage de travailleurs sur de plus courtes périodes?

La Commission Ham a fait une mise en garde contre le recours à un plus grand nombre de travailleurs de mines pendant de plus courtes périodes sans réduction de l’exposition totale au radon par inhalation, en précisant que cela ne réduira pas le nombre de victimes du cancer. S’il y a de quoi, cela pourrait faire augmenter le nombre de cas de cancer du poumon.

Le rapport de la Commission Ham, le Rapport BCMA, le rapport Thomas/MacNeill et le rapport 1988 BEIR-IV (du National Research Council des États‑Unis) ont tous indiqué que lorsque les niveaux d’exposition au radon sont plus faibles, le nombre de cas de cancer causés par unité de dose pourrait en fait augmenter. En d’autres mots, le fait de répartir une même dose totale sur une population plus vaste, en faisant en sorte que chaque personne recevra une dose plus faible, pourrait faire augmenter le nombre total de cas de cancer. Dans le rapport BEIR IV, on fait observer que ce phénomène est bien connu dans le cas des animaux de laboratoire, mais qu’il est moins clairement établi dans le cas des populations humaines.

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F. LES RÉSIDUS D’URANIUM

F.1. Qu’entend-on par résidus d’uranium?

Lors des travaux d’exploitation minière, l’uranium et ses produits de désintégration qui se trouvent à de grandes profondeurs sous le sol sont extraits avec le minerai qui est remonté à la surface. Le minerai est ensuite concassé et broyé pour obtenir des particules semblables à celles d’un sable fin. Une fois l’extraction chimique de l’uranium terminée, le sable restant est stocké dans des réservoirs de grande capacité. Ces amas de sable radioactif sont désignés par l’expression « résidus d’uranium » (parmi les autres expressions équivalentes utilisées, mentionnons « résidus miniers d’uranium » et « résidus de traitement de l’uranium »).

Les résidus d’uranium contiennent plus d’une douzaine de différentes matières radioactives qui sont très nocives pour les organismes vivants. Les plus importantes sont le thorium 230, le radium 226, le radon 222 (le radon) et les produits de filiation du radon, y compris le polonium 210.

Si les conditions ambiantes entraînent l’assèchement du sable radioactif stocké en surface, celui‑ci peut être entraîné par le vent et se déposer sur des végétaux, même ceux se trouvant à une grande distance, pour ensuite s’introduire dans la chaîne alimentaire. Il peut aussi être emporté jusqu’aux rivières et aux lacs et les contaminer.

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F.2. Qu’est-ce que le thorium 230?

Le thorium 230 est le produit de désintégration de l’uranium ayant la durée de vie la plus longue. Celle-ci peut atteindre des centaine de milliers d’années, ce qui correspond à une éternité, à l’échelle d’une vie humaine. Le thorium est particulièrement toxique pour le foie et la rate. Des données indiquent qu’il est la cause de différentes maladies du sang, notamment des leucémies. Sa désintégration produit du radium 226, lequel produit à son tour du radon (radon 222).

Par conséquent, la quantité de radium présent dans les résidus, tout comme celle du radon produit, ne diminueront pas de sitôt, car les deux matières radioactives sont continuellement générées par la désintégration du thorium 230 qui a une très longue durée de vie.

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F.3. Qu’est-ce que le radium 226?

Le radium 226 compte parmi les plus dangereux produits de désintégration de l’uranium. C’est un métal lourd radioactif et un puissant émetteur de particules alpha. Sa désintégration entraîne la production de radon comme sous‑produit. Le radium possède certaines caractéristiques chimiques similaires à celles du calcium, et par conséquent, son ingestion entraîne sa migration dans les os, les dents et le lait. Il est aussi facilement absorbé par les végétaux, notamment les plantes aquatiques, dans lesquelles sa concentration peut s’accroître par un facteur de l’ordre des centaines, voire des milliers.

Au cours de la première moitié du XXe siècle, on incorporait le radium à de la peinture afin de la rendre phosphorescente, mais de nos jours, on considère qu’il est trop dangereux pour être utilisé à de telles fins. De nombreuses jeunes femmes qui travaillaient avec cette peinture sont décédées du cancer des os ou de la tête. Les cas de cancer des os résultaient des quantités microscopiques de radium ingérées de manière involontaire. Ceux de cancer de la tête étaient reliés au radon généré dans l’organisme de ces femmes, qui se concentrait dans les sinus et l’antre mastoïdien.

On considère maintenant qu’il est dangereux de porter une montre dont les chiffres ont été peints avec la peinture au radium, car certains produits de désintégration émettent des rayons gamma dont l’intensité peut même être supérieure à celle des rayons X. Ce type de rayonnement peut avoir de graves effets sur l’organisme en le traversant, et ce, même si la source est située à une certaine distance. De fait, le radium est parfois utilisé en cancérothérapie parce qu’il possède ces caractéristiques et qu’il peut détruire des tumeurs.

Lorsque le radium est utilisé à des fins médicales, les quantités requises sont très petites. La plus grande partie du radium présent dans l’environnement global est actuellement rejetée avec le minerai concassé qui constitue un résidu de l’exploitation minière de l’uranium, malgré les données qui indiquent que cette matière représente un danger.

Plusieurs études réalisées aux États-Unis font état de taux de cancer et de leucémie plus élevés dans des collectivités où la concentration de radium dans l’eau est importante, mais il faut souligner que la relation de cause à effet constitue toujours une question litigieuse pour ces cas particuliers.

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F.4. Qu’est-ce que le radon 222?

Le radon 222 est un gaz toxique qui est produit lors de la désintégration du radium 226. Habituellement, la plus grande partie du radon produit est piégée dans la roche minéralisée gisant à de grandes profondeurs sous la surface terrestre. Toutefois, lors de l’extraction, du concassage et du broyage du minerai, d’importantes quantités de radon sont rejetées dans l’atmosphère. Les mineurs qui travaillent dans les exploitations d’uranium aspirent ce gaz radioactif et ses produits de filiation, qui se retrouvent alors dans les poumons.

Le radon et ses produits de filiation constituent de puissants agents cancérigènes. Même de petites doses, inhalées à maintes reprises sur une longue période, peuvent causer le cancer du poumon.

La désintégration du radium présent dans les résidus d’uranium entraîne une production continue d’importantes quantités de radon. Une légère brise peut entraîner ce gaz sur des milliers de kilomètres en quelques jours. Le long du trajet, des produits de filiation solides du radon sont continuellement déposés sur le sol, l’eau et les végétaux.

De plus, le radon se dissout facilement dans l’eau et il peut être entraîné par les eaux souterraines jusque dans les puits et les cours d’eau.

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F.5. Quels sont les produits de filiation du radon?

Le radon étant un gaz radioactif, il subit un processus de désintégration et génère sept produits de désintégration radioactifs désignés par l’expression « produits de filiation du radon ». Ces matières radioactives solides se fixent à de minuscules particules de poussière et gouttelettes de vapeur d’eau qui flottent dans l’atmosphère.


DIAGRAMME : Produits de filiation du radon

Processus de génération des produits de filiation du radon par désintégration radioactive


Traduction des légendes et du texte du diagramme :

 

ATOMIC MASS (number of protons and neutrons in the nucleus)
= NOMBRE DE MASSE [ou] MASSE ATOMIQUE
(nombre total de protons et de neutrons dans le noyau)

 

ATOMIC NUMBER (number of protons in the nucleus)
= NUMÉRO ATOMIQUE (nombre de protons dans le noyau)

 

short-lived radon progeny
(principal hazard to uranium workers)

= produits de filiation du radon à courte période
(risque principal pour les mineurs d’uranium)

 

long-lived radon progeny
(principal hazard from fallout)
<
= produits de filiation du radon à longue période
(risque principal associé aux retombées)

 

days = jours;       3.8 days = 3,8 jours;       years = ans;

minutes minutes;       microsec = microsecondes;       lead = plomb.;

 

Remarques relatives au diagramme

L’axe vertical du graphique présente le NOMBRE DE MASSE
et l’axe horizontal, le NUMÉRO ATOMIQUE.

Les FLÈCHES DIAGONALES indiquent une désintégration alpha
et les FLÈCHES HORIZONTALES, une désintégration bêta.

MeV = million d’électrons-volts
L’unité de MeV est une mesure de l’ÉNERGIE d’un rayonnement alpha.
Plus son énergie est élevée, plus elle peut avoir de graves effets sur les organismes.


Qu’est-ce que le nombre de masse et le numéro atomique?

Tous les atomes d’un élément donné sont identiques. Chaque atome est composé d’un élément central de petite taille, le « noyau », qui contient lui‑même des particules encore plus petites, les « protons » et les « neutrons ». Le nombre de protons présents dans le noyau correspond au « numéro atomique », tandis que le nombre total de protons et de neutrons présents correspond au « nombre de masse ». Ces valeurs constituent des caractéristiques de l’élément donné.

Des composés d’un élément qui ont le même numéro atomique ne peuvent être distingués au point de vue chimique, et ce, même si leurs nombres de masse sont différents. Ces composés sont désignés par le terme « isotopes ». Ainsi, le polonium 218, le polonium 214 et le polonium 210 constituent trois isotopes du polonium. Comme leurs noms respectifs l’indiquent, ils ont des nombres de masse différents, mais d’autre part, ils possèdent des propriétés chimiques communes, car ils ont tous le même numéro atomique, soit 84.

Lors du processus de « désintégration alpha », le noyau émet une particule alpha, laquelle se compose de deux protons et de deux neutrons. Le numéro atomique est donc réduit de deux unités et le nombre de masse, de quatre.

Lors du processus de « désintégration bêta », un des protons du noyau se transforme spontanément en neutron, et il y a émission simultanée d’un électron à grande vitesse. Le numéro atomique augmente donc d’une unité (puisqu’il y a maintenant un proton supplémentaire) et le nombre de masse ne varie pas. L’électron libéré est désigné par le terme « particule bêta ».


L’exhalation du radon, qui est un gaz, est aussi facile que son inhalation. Toutefois, ce sont les produits de filiation du radon qui, lors de leur inhalation, peuvent se loger dans les alvéoles pulmonaires. Une fois fixés, ils bombardent les délicats tissus du poumon de particules alpha et bêta et de rayonnement gamma. Les produits de filiation du radon comprennent divers composés radioactifs (ou « isotopes ») du bismuth, du polonium et du plomb. Les isotopes du bismuth et du plomb émettent des particules bêta et un rayonnement gamma de haute intensité, tandis que les isotopes du polonium émettent des particules alpha qui peuvent causer des dommages irrémédiables aux tissus bronchiques.

Lorsque du radon s’échappe des résidus d’uranium (voir la section F.4), les produits de filiation de celui‑ci reviennent par la suite à la surface de la Terre sous forme de retombées radioactives (pluie, neige ou poussières) qui s’introduisent dans les chaînes alimentaires des milieux aquatiques et terrestres. Quelques jours après le dépôt des produits de filiation, seuls le plomb 210 et le polonium 210 sont encore présents, car les autres se sont en grande partie désintégrés et il n’en reste que d’infimes quantités.

L’ingestion de plomb 210 et de polonium 210 présents dans les légumes, les fruits, le poisson et la viande contaminés, est suivie de leur absorption par l’organisme, tout comme dans le cas des matières non radioactives.

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F.6. Qu’est-ce que le polonium?

Trois isotopes du polonium font partie des produits de filiation du radon, soit le polonium 218, le polonium 214 et le polonium 210. Ces substances pernicieuses sont responsables de la plus grande partie des dommages biologiques attribuables au radon. Il faut particulièrement noter que le polonium 214 et le polonium 218, lorsqu’ils ont été inhalés, libèrent des doses massives de rayonnement alpha dans les poumons, ce qui provoque la fibrose des tissus pulmonaires et le cancer.

Les résultats d’études sur les animaux confirment que le polonium, même en quantités minimes, est une matière extrêmement dangereuse. Le rapport BEIR‑IV de 1988 contient un énoncé selon lequel le polonium 210 est beaucoup plus dangereux que le plutonium, pour des niveaux d’exposition élevés, qu’il est à peu près équivalent au plutonium (lequel entraîne des dommages cinq fois plus graves que le radium), pour des niveaux d’exposition moyens, et que dans le cas de très faibles niveaux d’exposition, sa toxicité est presque équivalente à celle du radium.

La nature et l’importance de la chaîne alimentaire lichen‑caribou (qui a été traitée dans la section C.3) explique le fait que la chair des caribous des régions arctiques et du nord de la Saskatchewan présente une concentration beaucoup plus élevée de polonium 210 que celle de tout autre animal vivant en Amérique du Nord. Il en résulte que la concentration de polonium 210 de l’organisme des Inuits du Canada est jusqu’à 80 fois plus élevée que celle des autres habitants de l’Amérique du Nord. L’exploitation minière de l’uranium ne peut qu’aggraver le problème, car elle entraînera un accroissement des quantités de polonium 210 présent dans l’atmosphère et des particules qui se déposent sur le lichen, sous forme de retombées attribuables aux résidus d’uranium et aux corps minéralisés dont l’exploitation a été interrompue.

Il existe de plus en plus de données indiquant que le polonium 210 inhalé avec la fumée du tabac est responsable de la plus grande partie des dommages biologiques causés par les cigarettes. Les résultats d’autopsies démontrent que la concentration de polonium 210 des poumons de fumeurs est plus élevée que celle des non-fumeurs. Les résultats d’études sur les animaux indiquent que le polonium 210 présent dans les poumons constitue un agent cancérogène très efficace. Il peut aussi pénétrer dans le circuit sanguin et provoquer des radiolésions dans les vaisseaux sanguins, puis bloquer les artères et causer des attaques d’apoplexie et des crises cardiaques.

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G. L’URANIUM ET L’ENVIRONNEMENT

G.1. Quels sont les risques les plus sérieux pour l’environnement attribuables à l’exploitation d’une mine d’uranium?

Voici une liste des risques les plus sérieux pour l’environnement : 1) la contamination des eaux souterraines et des réseaux hydrographiques par dissolution des matières radioactives; 2) les défaillances catastrophiques des dispositifs de confinement de résidus; 3) la dispersion de poussières radioactives, qui se retrouvent par la suite dans les eaux, les plantes, les animaux, les poissons et les humains; 4) les rejets de radon dans l’atmosphère, ce qui entraîne le dépôt de produits de filiation du radon sur le sol, dans un périmètre pouvant atteindre des centaines de milles; 5) la pollution des eaux de surface et souterraines par des polluants chimiques présents dans les résidus, notamment des métaux lourds, des acides, de l’ammoniaque et des sels.

À court terme, c’est la pollution chimique qui a déjà causé, et de loin, les dommages les plus sérieux. Des groupes entiers d’organismes ont disparu en aval de certaines zones de stockage de résidus d’uranium. Les dangers dus au rayonnement sont de nature plus subtile et n’apparaîtront que sur une plus longue période.

Si les résidus d’uranium ne sont pas éliminés de manière adéquate, les dangers susmentionnés se perpétueront sans fléchir pendant des milliers d’années. En fait, les dangers associés aux résidus augmenteront probablement au fil du temps, en raison de nombreux facteurs tels que l’érosion du milieu, la négligence en matière de gestion et les répercussions du changement climatique.

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G.2. L’exploitation minière de l’uranium entraîne‑t‑elle la pollution des eaux?

Lors de l’exécution d’activités normales d’extraction et de traitement de l’uranium, des matières radioactives et d’autres contaminants chimiques (y compris de l’acide sulfurique) sont rejetés dans les eaux. À la fin des années 1970, en Ontario, le système hydrographique complet de la rivière Serpent, y compris plus de douze lacs, était déjà gravement contaminé, jusqu’à 55 miles en aval des mines d’uranium de la région d’Elliot Lake. La Commission mixte internationale a alors établi que le système de la rivière Serpent constituait la plus importante source de contamination au radium des Grands Lacs. Depuis, la mise en œuvre de mesures correctives a permis d’améliorer la situation à ce chapitre.

S’il y a défaillance d’un système de confinement de résidus, les rivières et les lacs servant de sources d’eau pour les humains et les animaux peuvent être complètement dégradés. Dans la région d’Elliot Lake, on a signalé plus de trente ruptures de bassins de retenue de résidus. En 1979, un nouveau bassin de retenue de résidus construit au moyen de techniques de pointe s’est subitement effondré, à Churchrock (Nouveau‑Mexique); ce déversement constituait le plus important incident de rejet accidentel de matière radioactive dans l’environnement, jusqu’à ce que le désastre nucléaire de Tchernobyl ne l’éclipse.

Aux installations de Key Lake, en Saskatchewan, on a signalé plus de six déversements de matières radioactives au cours des six premiers mois d’exploitation de la mine, en 1985. La mine Key Lake possède des installations modernes, mais le principal problème a trait à la petite taille de la zone de stockage des résidus d’uranium.

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G.3. Quels sont les dangers posés par les résidus d’uranium pour les humains, la faune et l’environnement?

Le système de stockage des résidus d’uranium qui en assurerait le confinement idéal n’existe pas encore. C’est donc dire qu’il est inévitable que les humains et les animaux qui s’approchent des résidus ingèrent ou inhalent une partie des matières radioactives qui se sont infiltrées dans l’atmosphère, l’eau et les aliments. Les dommages résultants peuvent toucher les poumons, la peau, les reins, le sang, les os et les organes reproducteurs. Après un certain nombre d’années, les dommages peuvent entraîner de nombreuses maladies, y compris des cancers et la leucémie. Ils peuvent aussi provoquer des maladies et des malformations chez les enfants, parfois même avant leur naissance.

Une étude approfondie portant sur des Indiens Navajo ayant travaillé comme mineurs dans des exploitations d’uranium et sur des personnes vivant à proximité de zones de stockage de résidus d’uranium sur le plateau du Colorado, est presque terminée. Les enfants des sujets de l’étude présentent un taux très élevé d’anomalies congénitales. Dans le cadre d’une autre étude en cours d’exécution en Malaisie, on examine les cas de mauvaise santé que présentent les enfants qui ont été exposés à des résidus de thorium et d’uranium, ainsi que les changements subis par leur sang.

Les matières radioactives présentes dans les résidus peuvent aussi être transportées sur de grandes distances lorsqu’elles se retrouvent dans les organismes d’animaux (mammifères, poissons, oiseaux et insectes). Toute personne qui mange la chair de certains de ces animaux contaminés introduit du même coup des matières radioactives dans son corps.

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G.4. Existe‑t‑il des moyens d’éviter ce type de contamination radioactive?

Les personnes ne peuvent survivre sans respirer, manger et boire. Il est donc, jusqu’à un certain point, impossible d’éviter tout contact avec les matières radioactives rejetées dans l’environnement à la suite de l’extraction du minerai à grande profondeur et de son broyage et son traitement à la surface. La prévention constitue la seule solution à ce problème. Il faudrait empêcher à tout prix le minerai broyé de se retrouver dans l’environnement ou alors, éviter de ramener à la surface la matière radioactive présente dans le minerai.

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G.5. Pendant combien de temps les résidus seront‑ils radioactifs?

La radioactivité de l’uranium extrait du minerai pour être traité et vendu ne représente qu’environ le septième de la valeur totale liée au minerai. La différence est associée aux résidus dont le niveau de radioactivité restera dangereux pendant des centaines de milliers d’années, soit une période de loin supérieure à celle de l’histoire humaine connue.

De fait, la quantité de radium présent dans les résidus et celle de radon émis par ceux‑ci ne diminueront pas sensiblement au cours des 5000 à 10 000 premières années (mentionnons, en passant, que les pyramides d’Égypte ont été construites il y a environ 5000 ans). Après 80 000 ans, ces quantités n’auront diminué qu’à peu près de moitié.

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G.6. Quand les risques associés aux résidus d’uranium pourront‑ils être éliminés?

Si on ne consacre pas d’importantes sommes à l’élaboration de techniques de stockage en profondeur des résidus miniers et de traitement, ceux‑ci resteront sur le site minier indéfiniment. À ce jour, parmi tous les sites de mine ou d’usine de traitement répartis à travers le monde, aucun n’a encore été décontaminé de manière adéquate et permanente.

Les États-Unis ont adopté de nouvelles lois rigoureuses portant sur le recouvrement (mais pas sur l’enfouissement) des résidus de mines et d’usines de traitement, ce qui a incité des sociétés minières à déplacer leurs activités dans des pays où de telles lois détaillées n’existent pas. Aucune loi canadienne ne force les sociétés minières à éliminer ou recouvrir les résidus susmentionnés ou à les enfouir dans des formations rocheuses très profondes. Dans la plupart des installations canadiennes, le site de stockage des résidus contenant des matières radioactives n’est même pas protégé à l’aide de clôtures et il n’existe aucun panneau d’avertissement indiquant que l’endroit est dangereux.

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G.7. Les techniques scientifiques de pointe permettent‑elles d’éliminer le rayonnement atomique émis par les résidus radioactifs?

Il n’existe pas de technique scientifique de pointe permettant d’éliminer ce rayonnement, ni de méthode pratique de neutraliser les matières radioactives, de les détruire ou de les rendre sans danger.

Des essais sont en cours pour enfouir dans le sol les résidus miniers radioactifs et ceux de traitement, dans un milieu semblable à celui du minerai qui les contenait. Les matières radioactives des résidus étaient en effet moins dangereuses pour les animaux et les humains lorsqu’elles étaient confinées à des formations souterraines.

Toutefois, nous n’avons aucun moyen de transformer le sable en une roche, ni d’extraire le radon, les effluents liquides et les poussières radioactives des milieux où ils ont été rejetés. De plus, la dissolution des résidus finement broyés est beaucoup plus facile que celle du minerai d’origine et par conséquent, rien ne garantit que l’enfouissement des résidus n’entraînera pas la contamination des eaux souterraines. Finalement, puisque la période durant laquelle les résidus sont dangereux est tellement longue, il est difficile d’établir clairement si les méthodes de stockage actuelles sont adéquates.

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G.8. Quels sont les effets à long terme de l’exploitation minière de l’uranium? [Dre Stella Swanson]

Voici une liste des faits connus :

  • Des données indiquent que la teneur en radionucléides du biote aquatique (poissons, insectes, myes, plantes) augmente en aval des zones de stockage de résidus miniers d’uranium et que cette augmentation est plus importante à proximité des mines plus anciennes.

  • La teneur en radionucléides des plantes terrestres situées à proximité des mines et usines de traitement d’uranium suit la même tendance haussière et l’augmentation est aussi plus importante près des mines plus anciennes.

  • On observe une concentration des radionucléides de la famille de l’uranium dans les plantes qui se trouvent au début de la chaîne alimentaire, mais pas de bioamplification, ce qui veut dire que leur concentration n’augmente pas avec les étapes successives de la chaîne alimentaire. Ils ont donc un comportement différent de celui du mercure, ce qui est heureux pour les prédateurs en bout de chaîne comme les humains. Toutefois, ceci ne veut pas dire que les humains et les autres animaux se trouvant au bout des chaînes alimentaires ne sont pas soumis à des doses de rayonnement, mais plutôt que ces doses sont beaucoup moins importantes que si le comportement des radionucléides était semblable à celui du mercure. Par ailleurs, les effets sur les biotes se trouvant au début de la chaîne alimentaire (où les doses de rayonnement sont plus élevées) pourraient aussi avoir, à long terme, des répercussions écologiques.

  • Dans le cadre d’études réalisées vers la fin des années 1960, on a déterminé que l’organisme des caribous et des rennes des régions arctiques présentait des concentrations importantes de radionucléides émis lors d’essais nucléaires atmosphériques. Les données recueillies par après indiquent que ces concentrations décroissent de façon continue. Toutefois, aucune étude ciblée n’a été exécutée sur les animaux qui migrent dans les zones d’exploitation minière de l’uranium et aucune étude récente ne traite de la localisation des radionucléides de la famille de l’uranium dans les chaînes alimentaires sensibles du milieu arctique.

  • L’exploitation minière de l’uranium produit plusieurs autres contaminants, y compris l’arsenic, le nickel et des sels dont la concentration est beaucoup plus élevée que les concentrations naturelles (ou concentrations de fond). De plus, certains résidus d’uranium sont très acides, ce qui entraîne le rejet de métaux supplémentaires dans l’environnement.

  • L’amélioration des méthodes de traitement des résidus d’uranium employées dans les mines ayant ouvert leurs portes après 1980 s’est traduite par une importante diminution du taux de rejet de radionucléides et de métaux dans l’environnement.

  • Selon des estimations, les doses de rayonnement auxquelles sont soumises des personnes qui consomment hebdomadairement du poisson provenant d’un lac contaminé par des rejets d’une ancienne mine d’uranium constituent de 1 à 2 % de la limite de dose annuelle établie pour le grand public. Ces valeurs estimées correspondent au scénario de la pire éventualité. La valeur de telles doses est sujette à discussion, car elle fait appel au jugement, en matière du risque de rayonnement acceptable, et de plus, il existe un certain désaccord au chapitre des méthodes scientifiques utilisées pour calculer la dose.

Voici une liste de certains faits qui n’ont pas encore été clairement déterminés :

  • Nous ignorons quels sont les effets, sur les biotes et les écosystèmes en général, de l’exposition chronique à un rayonnement de faible intensité. Nous pouvons estimer sommairement quels seront ces effets, en nous basant sur les résultats d’expériences de laboratoire avec des doses de rayonnement de plus forte intensité et d’une autre nature, mais en définitive, nous ne possédons pas de données recueillies sur le terrain.

  • Jusqu’à tout récemment, on supposait que les mesures et dispositifs visant à protéger les humains des rayonnements étaient aussi efficaces pour les autres organismes vivants. Cette hypothèse est maintenant remise en question. Il serait peut‑être préférable d’adopter une approche mettant l’accent sur l’écosystème touché.

  • Nos connaissances sur les concentrations de radionucléides de la chair de gibier consommée de manière régulière par les personnes vivant à proximité de mines d’uranium sont incomplètes.

  • Nous ignorons quelles méthodes de déclassement de mines d’uranium permettent de réduire au minimum la migration des radionucléides sur des périodes de plusieurs millénaires; les mines d’uranium déclassées doivent faire l’objet dune étude approfondie.

  • Nous ignorons l’importance des effets des autres contaminants associés à l’exploitation minière de l’uranium. Ceux‑ci pourraient se révéler plus nocifs pour les biotes indigènes que ne le sont les rayonnements.

Le débat sur le cycle de vie du combustible nucléaire présente un problème crucial, soit l’ignorance. Les scientifiques ne peuvent tout simplement pas établir quels sont les effets de l’exposition chronique à un rayonnement de faible intensité des êtres humains ou des autres biotes. Nous pouvons, tout au mieux, faire des estimations sommaires en extrapolant les données sur les victimes de rayonnement de forte intensité, par exemple celui de bombes atomiques et de fuites de réacteurs nucléaires, comme dans le cas de l’incident de Tchernobyl. Pour bien saisir la situation, il faudra attendre le passage de plusieurs décennies et la réalisation d’études poussées sur de larges populations de sujets touchés. Entre-temps, nous devons nous poser les questions suivantes : « Voulons‑nous vraiment vivre avec un tel degré d’incertitude? » et « Quels risques sommes‑nous prêts à accepter, en tant que société?

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H. LA RÉGLEMENTATION DE LA GESTION DES RÉSIDUS

H.1. Qui a la responsabilité de réglementer la gestion des résidus d’uranium au Canada?

Pendant l’exploitation d’une mine et d’une usine de traitement d’uranium, la gestion des résidus est réglementée par la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN)   [précédement la Commission de contrôle de l’énergie atomique (CCEA)]   et par les autorités provinciales compétentes. Cependant, une fois que le site où se trouvent les résidus d’uranium a été abandonné, particulièrement lorsque la société propriétaire ou exploitante a été dissoute ou a disparu, il existe une grande confusion en ce qui a trait à la responsabilité de gestion des résidus.

Au Canada comme dans d’autres pays, on signale de nombreux cas où des lacunes de réglementation ou de surveillance, de la part des autorités, ont entraîné l’utilisation de centaines de milliers de tonnes de résidus miniers et de déchets de raffinage radioactifs pour construire des maisons et des écoles, lesquelles ont alors constitué des milieux présentant des taux inacceptables d’exposition au rayonnement. En Ontario, il existe plusieurs sites de stockage de résidus qui ont été abandonnés sans toutefois être bien protégés à l’aide de clôtures ou sans la mise en place de panneaux d’avertissement adéquats. Les animaux peuvent facilement avoir accès à ces vastes zones contenant du sable radioactif, tout comme la plupart des gens ordinaires, y compris les enfants, lors de randonnées à vélo, de pique‑niques et de cueillettes de petits fruits sauvages. Il faut aussi tenir compte du risque permanent de l’utilisation de ce sable, en apparence sans danger, comme matériau de remblai ou de construction de bâtiments.

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H.2. Quelles sont les exigences des règlements en vigueur?

Les exigences des règlements comprennent la conception, la construction, l’entretien et la surveillance de barrières artificielles de confinement des résidus afin de garantir leur stockage pendant la période d’exploitation des mines et des usines de traitement d’uranium. Elles portent aussi sur le traitement des effluents et les mesures et dispositifs garantissant l’accès restreint au site, ainsi que sur les critères qui doivent être respectés en matière de fermeture du site, en prévision de l’abandon des stocks de résidus.

Au cours de la période d’exploitation, il faut garantir le confinement des résidus derrière un quelconque mur de soutènement. Les exigences des règlements comprennent aussi l’utilisation de dispositifs qui réduisent le soulèvement des poussières radioactives par le vent et le rejet atmosphérique de radon. De plus, des mesures concrètes de prévention de l’infiltration des produits chimiques et des radionucléides dans le sol sous‑jacent et de réduction des niveaux de radioactivité des eaux de ruissellement doivent être approuvées. Dans des cas exceptionnels, par exemple lorsqu’une portion des résidus présente une activité radioactive volumique anormalement élevée, les organismes de réglementation peuvent exiger l’adoption de mesures particulières et la mise en place de dispositifs spéciaux.

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H.3. Les règlements en vigueur sont‑ils efficaces?

Dans l’ensemble, la gestion des résidus pendant la période d’exploitation s’est grandement améliorée au cours des quinze dernières années. On signale pourtant de nombreux déversements de matières radioactives, et ce, même dans les mines ayant ouvert leurs portes récemment. La formation des inspecteurs n’est pas très poussée et bien souvent, ils ne relèvent pas des infractions claires aux règlements.

Le confinement à long terme des résidus d’uranium constitue encore un important problème sans solution adéquate. Deux des cas les plus graves de défaillance se sont produits vers la fin des années 1970 et le début des années 1980. Le premier, dont nous avons déjà discuté, s’est produit en 1979, à Churchrock (Nouveau‑Mexique), lorsqu’un grand bassin de retenue de résidus construit au moyen de techniques de pointe s’est subitement effondré. Puis, au début des années 1980, un projet a été lancé aux installations de Cluff Lake, en Saskatchewan; il avait comme objectif de stocker des résidus fortement radioactifs dans des milliers de « cuves » en béton. Le tout a été un échec, car bien que les cuves aient été conçues pour résister pendant des siècles, on a observé des fissures et des fuites dans des douzaines d’entre elles, moins de cinq ans après leur mise en service.

Dans le cas des sites de stockage de résidus abandonnés, il n’est pas certain que des règlements puissent empêcher la contamination à grande échelle de l’environnement. Les niveaux de radioactivité des résidus et les quantités de radon produit par ceux‑ci ne diminueront pas sensiblement pendant plus de 10 000 ans. Comment pourrait‑on empêcher les processus naturels d’érosion, de migration, de dispersion et de dissolution? Qui pourra assurer la surveillance des résidus et l’adoption de mesures correctives? Et qui fournira les sommes nécessaires au déploiement de ces futurs efforts?

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H.4. Les organismes de réglementation sont‑ils indépendants de l’industrie?

En théorie, lla Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN)   [précédement la Commission de contrôle de l’énergie atomique (CCEA)]   rend compte au ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources du Canada, et celui‑ci est responsable d’Énergie atomique du Canada limitée (une société d’État ayant pour mandat la conception, la construction et la commercialisation de réacteurs nucléaires) et de la société Cameco (une autre société d’État, anciennement connue sous la raison sociale de Eldorado Nucléaire Limitée, qui est propriétaire et exploitante de mines et d’usines de raffinage d’uranium).

De plus, la plupart des employés de la CCSN (précédement la CCEA) proviennent de divers secteurs de l’industrie nucléaire, y compris de sociétés d’exploitation et de traitement de l’uranium. Par le passé, de nombreux membres du conseil de la CCEA étaient, en fait, des représentants des industries dont les activités sont réglementées par ce même organisme.

 

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J. LES EFFETS DU RAYONNEMENT SUR LA SANTÉ

J.1. Le corps humain peut-il se protéger contre les matières radioactives?

Le corps ne possède aucun moyen de se protéger contre les substances radioactives présentes dans les aliments ou dans l’air. Il les incorpore et ceux‑ci se fixent dans les poumons, les muscles, les os et d’autres organes, tout comme s’il s’agissait d’air propre ou d’aliments naturels.

À l’intérieur du corps, lors que les matières radioactives se désintègrent, il se produit de petites explosions (microscopiques) qui endommagent les cellules vivantes. Lorsqu’un grand nombre de ces cellules sont endommagées, le corps n’est plus en mesure de lutter contre les différentes infections qui se présentent.

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J.2. Comment le rayonnement peut-il causer le cancer?

Les maladies chroniques – y compris la leucémie ou le cancer – peuvent être causées par le rayonnement. Lorsque des cellules sont endommagées de telle sorte qu’elles commencent à se reproduire de manière anormale et incontrôlée, elles sont devenues des cellules cancéreuses. À mesure que le cancer s’installe, il détruit les cellules saines et, à moins que l’on procède à un traitement, il peut détruire éventuellement l’organisme de la personne atteinte. La leucémie est un cancer de la moelle osseuse où l’on assiste à une surproduction non contrôlée des leucocytes au détriment des autres cellules sanguines.

Le cancer met un certain temps à se développer, alors ses effets ne se font pas sentir dans l’immédiat. Cela prend souvent des années avant que le cancer causé par l’inhalation de matières radioactives en suspension dans l’air ou par la consommation d’aliments contaminés puisse être détecté par un médecin. Même à ce moment-là, il est habituellement impossible pour le médecin de déterminer si ce cancer en particulier a effectivement été causé par l’exposition au rayonnement.

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J.3. Comment le rayonnement peut-il causer des défauts génétiques chez les enfants?

Les dommages causés par le rayonnement aux cellules reproductrices du père ou aux ovules de la mère peuvent entraîner des défauts génétiques chez l’enfant. Les travailleurs sous rayonnements, comme les travailleurs des mines d’uranium, présentent le plus grand risque d’avoir des enfants ayant des défauts génétiques parce qu’ils sont en contact avec des matières radioactives. Un enfant dont les cellules ont été endommagées par le rayonnement pourrait à son tour transmettre des défauts génétiques aux générations futures. 

Comme les spermatozoïdes du père se remplacent tous les trois ou quatre mois, on pourrait supposer qu’il n’a qu’à attendre quelques mois après avoir cessé de travailler dans la mine avant de concevoir un enfant. Cependant, si son corps est contaminé par des matières radioactives à longue période, son sperme pourrait continuer d’être endommagé par l’exposition interne au rayonnement même après qu’il ait cessé de travailler dans la mine. 

La femme naît avec un nombre d’ovules qui reste fixe tout au long de sa vie. Les femmes dont les ovules sont endommagés peuvent donner naissance à des enfants qui présentent des défauts génétiques de nombreuses années après avoir été exposées.

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J.4. Comment a-t-on découvert que le rayonnement pouvait causer des dommages génétiques?

Des dommages génétiques ont été observés et documentés pour toutes les espèces faisant habituellement l’objet d’expériences en laboratoire, soit les  mammifères, les insectes, les micro-organismes et les plantes.

Les dommages génétiques donnent parfois lieu à des organismes non viables, suite à des avortements spontanés ou à une mort prématurée. Certains types de dommages génétiques donnent lieu à des anomalies ou à des difformités apparentes, alors que d’autres sont plus difficiles à détecter. En fait, certains dommages génétiques ne sont pas visibles dans les premières ou deuxièmes générations, mais seulement plusieurs générations plus tard.

Pour la population humaine, on ne dispose que de très peu de preuves directes des dommages génétiques causés par le rayonnement. Plusieurs études scientifiques montrent une augmentation importante de l’incidence d’une maladie génétique, connue sous le nom de syndrome de Down (appelée également mongolisme) chez des sujets dont la mère avait été irradiée, mais d’autres études ne font pas état d’une augmentation comparable. L’incidence particulièrement élevée des cas de personnes atteintes du syndrome de Down a également été signalée dans certaines zones géographiques où les niveaux du rayonnement de fond sont particulièrement élevés. Ainsi, même s’il existe une preuve à l’effet que l’exposition au rayonnement est à l’origine du syndrome de Down, aucun lien direct ne peut être établi.

En dépit de l’absence d’études concluantes montrant les effets génétiques du rayonnement chez l’humain, les scientifiques considèrent qu’il est presque certain que ces effets existent car ils ont été démontrés pour de nombreuses autres espèces. 

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J.5. Comment le rayonnement peut-il affecter un enfant en gestation?

Une étude britannique récente (le rapport Gardner, publié dans le Journal of the British Medical Association en février 1990) montre que les enfants des travailleurs de la centrale nucléaire de Sellafield dans le nord de l’Angleterre connaissent des taux de leucémie beaucoup plus élevés que d’autres enfants. L’exposition du père au rayonnement semble jouer un rôle important. Il se pourrait que les dommages causés au sperme par le rayonnement avant la conception causent des leucémies chez les enfants qui naîtront plus tard – mais on ne sait pas exactement ni comment ni pourquoi.

Même si la mère et le père conçoivent un enfant en bonne santé, celui‑ci demeure vulnérable au rayonnement alors qu’il se trouve dans l’utérus de la mère. Tout ce que la mère consomme se retrouve dans le cordon ombilical et atteint le bébé; ainsi, des dommages peuvent être causés à l’enfant et celui‑ci naîtra avec une maladie ou une difformité.  L’enfant à naître peut également être affecté par le rayonnement à fort pouvoir de pénétration auquel la mère est exposée. Parfois, lorsqu’un embryon est gravement affecté par le rayonnement avant la naissance, il y a avortement spontané ou l’enfant meurt au moment de la naissance.

La déficience mentale due à des dommages au cerveau est la forme la plus probable de trouble de croissance résultant de l’exposition au rayonnement, lorsque celle‑ci a lieu durant la période critique de la formation du cerveau. La déficience mentale causée par le rayonnement a été observée et documentée chez les animaux ainsi que chez l’humain.

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J.6. Existe-t-il une cure pour les victimes du rayonnement?

Certains dommages causés par le rayonnement sont réparés par le corps lui‑même. Il est rare que la guérison soit parfaite cependant. Les traitements médicaux peuvent alléger certains effets secondaires des dommages causés par le rayonnement et peuvent prolonger la durée de vie, notamment les chirurgies ou les traitements contre le cancer.

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J.7. La radioactivité peut-elle être détectée par les sens?

Sous une forme concentrée, le radium, le thorium ou le polonium peuvent causer des brûlures graves. L’uranium peut également émettre un rayonnement suffisamment intense pour tuer une personne lorsqu’il explose dans une bombe atomique ou qu’il « brûle » dans un réacteur nucléaire. 

Toutefois, à de plus faibles doses, comme celles associées à l’extraction minière de l’uranium, le rayonnement atomique ne peut pas être détecté par les sens. Des instruments spéciaux sont requis. Le rayonnement alpha, qui est le type de rayonnement émis par le radon et par la plupart des produits de désintégration de l’uranium, est difficile à détecter, même avec des instruments.

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J.8. L’exposition aux rayons X dans le cadre d’examens médicaux/dentaires est-elle dangereuse?

Bien que les rayons X soient souvent utiles et parfois nécessaires, ils peuvent causer des dommages aux cellules vivantes, en augmentant légèrement le risque d’exposition individuelle de dommages génétiques aux descendants de la personne ayant été exposée. C’est pourquoi des tabliers ou des écrans de plomb sont utilisés pour protéger les gonades des patients.

Comme toutes les formes de rayonnement, le danger associé aux rayons X est cumulatif; il augmente à chaque nouvelle dose. C’est pourquoi les médecins, les infirmières et les techniciens quittent souvent la pièce ou se postent derrière une paroi quelconque lorsqu’une dose de rayons X est administrée à un patient.

Même si le risque associé aux rayons X est faible, les conséquences de l’exposition courante à ces rayons ne sont pas négligeables sur le plan de la santé publique, à cause du grand nombre de personnes exposées à de petites doses. C’est pour cette raison que les appareils à rayons X qui étaient utilisés dans des magasins de souliers (pour permettre aux enfants de s’amuser en voyant le squelette de leurs orteils) ont été retirés, et que des programmes d’exposition thoracique aux rayons X à grande échelle ont été discontinués.

Il y a vingt-cinq ans, Dr Alice Stewart (médecin britannique) avait démontré qu’une dose unique de rayons X à l’abdomen d’une femme enceinte augmentait de cinquante pour cent les risques que l’enfant développe ultérieurement une leucémie. Aujourd’hui, il est inacceptable que les fœtus soient exposés à des rayons X, à moins d’indication contraire pour des raisons médicales justifiées.

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K. RÉGLEMENTATION DE L’EXPOSITION AU RAYONNEMENT

K.1. Qu’entend-on par niveau « acceptable » d’exposition au rayonnement?

Il n’existe pas de preuve scientifique à l’effet qu’il existerait une dose de rayonnement « sûre ». La preuve mène plutôt à des conclusions opposées – c’est‑à‑dire que le rayonnement administré à une vaste population, peu importe sa taille, causera une augmentation correspondante du nombre de cancers, de défauts génétiques chez les descendants ou d’autres maladies.

L’augmentation de l’incidence des cancers et des défauts génétiques semble être à peu près proportionnelle au rayonnement reçu par une population entière. Si la dose de rayonnement est réduite de moitié, l’augmentation du nombre de personnes qui mourront d’un cancer ou qui auront des enfants avec des défauts génétiques sera également réduite de moitié, mais le niveau de dommage causé à chaque personne affectée ne diminuera pas. Le fait de diminuer la dose réduit la fréquence mais pas la gravité des conséquences médicales. Tous les organisme de réglementation du monde utilisent ce principe comme fondement de la réglementation de l’exposition au rayonnement.

Étant donné qu’aucune dose n’est considérée comme étant sûre, il n’existe aucune manière objective ou scientifique de décider ce que constitue une dose acceptable. Il s’agit d’un choix social ou politique, pas d’un choix technique ou scientifique. La situation se complique lorsque les personnes qui en tirent parti ne sont pas les seules qui ont pris des risques.

La science peut seulement nous aider à évaluer les risques – comme le nombre de personnes susceptibles de souffrir d’un cancer, le nombre d’enfants susceptibles de naître avec des défauts génétiques, ou le type de maladies pouvant connaître une augmentation par suite d’une exposition donnée au rayonnement. Cependant, déterminer si ces conséquences sont acceptables ou non dépasse la portée de la science.

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K.2. Qui a la responsabilité de la réglementation de l’exposition au rayonnement au Canada?

La Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN, anciennement connue sous le nom de Commission de contrôle de l’énergie atomique, ou CCEA) a la responsabilité de réglementer l’exposition au rayonnement au Canada, en collaboration avec le Bureau de la radioprotection de Santé Canada. Comme la CCSN (précédement la CCEA) ne possède que très peu d’expertise médicale ou épidémiologique, elle dépend grandement de la recherche et des recommandations faites par des organismes étrangers.

Plus particulièrement, elle se fie aux recommandations de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR), organisme consultatif autodésigné qui compte d’éminents scientifiques qui ont travaillé dans le domaine du rayonnement. On a déjà dans le passé accusé les membres de la CIPR de se trouver en situation de conflit d’intérêt, parce que leurs carrières sont basées sur des emplois qui exposent inévitablement les personnes au rayonnement artificiel.

La CCSN (précédement la CCEA) fixe un niveau maximal admissible d’exposition au rayonnement pour les travailleurs du secteur nucléaire et pour les membres du public en général. Ces niveaux ne sont pas considérés par la CIPR comme étant des niveaux acceptables pour l’exposition continue, mais plutôt comme étant des limites supérieures au-delà desquelles l’exposition au rayonnement devient clairement inacceptable. On tente actuellement de maintenir les expositions à une fraction des limites maximales admissibles, mais il n’y a aucune garantie que ce sera toujours le cas.

L’industrie et les organismes de réglementation affirment qu’ils suivent le principe ALARA, qui veut que l’on maintienne les expositions au rayonnement « au niveau le plus faible qu’il soit raisonnablement possible d’atteindre, compte tenu de facteurs sociaux et économiques ». Mais qui décide de ce qui est raisonnable? Les critiques de l’industrie expliquent que l’exposition actuelle au rayonnement en milieu de travail et que l’exposition du public sont déjà considérablement élevées dans de nombreux cas, particulièrement à la lumière d’études scientifiques récentes publiées en 1988 qui indiquent que le risque d’exposition au rayonnement de faible intensité est deux à huit fois plus élevé que ce l’on croyait.

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K.3. Quel est le fondement de l’établissement des normes relatives au rayonnement?

Les normes relatives au rayonnement sont très arbitraires. Même si des niveaux admissibles d’exposition au rayonnement ont été définis pour les travailleurs et pour le public en général, ces niveaux ne sont pas considérés comme étant sûrs, ni même acceptables. La Commission internationale de protection radiologique (CIPR) précise qu’il serait inacceptable que des travailleurs ou des membres du public soient exposés de manière continue aux niveaux de dose maximale admissible. 

Les normes relatives au rayonnement ne visent que les personnes, et ne tiennent pas compte des autres espèces. L’hypothèse voulant que si les humains sont protégés, alors les autres organismes vivants devraient l’être, est sérieusement remise en question.

Deux méthodes sont utilisées pour justifier l’existence des normes relatives au rayonnement. La première comprend l’évaluation des risques de décès et de dommages génétiques suite à une dose donnée de rayonnement, en comparant ces résultats avec d’autres risques (p. ex. décès suite à un accident de voiture, travail dangereux, incendies, tremblements de terre et défauts congénitaux, hyperphagie, etc.), et la deuxième méthode comprend la comparaison des niveaux admissibles de rayonnement artificiel avec les niveaux du rayonnement de fond. 

Ces méthodes ont été vivement critiquées. La première compare des risques d’exposition au rayonnement sur lesquels la personne n’a pas vraiment de contrôle et qu’elle ne peut pas choisir d’éviter. Cette méthode suppose également un certain niveau de connaissance des risques réels d’exposition à un rayonnement de faible intensité; mais il n’existe aucune preuve scientifique à l’effet que ces risques ont été gravement sous‑estimés pendant des décennies. La deuxième méthode ne tient pas compte des différences entre le rayonnement de fond et le rayonnement artificiel; ce dernier implique la présence de matières radioactives ou de mécanismes biologiques qui ne sont pas nécessairement caractéristiques du rayonnement de fond.

Les deux méthodes supposent qu’il est acceptable d’ajouter des risques d’exposition au rayonnement qui sont « améliorés sur le plan technologique » à tous les autres risques auxquels nous sommes déjà exposés, ou de multiplier les risques imputables au rayonnement de fond par un facteur arbitraire.

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K.4. Qu’est-ce que le « rayonnement de fond »?

Certaines expositions au rayonnement sont inévitables, même en l’absence d’activités d’extraction minière ou de technologie nucléaire. C’est le cas de l’exposition au « rayonnement de fond » qui est due à de petites quantités de matières radioactives dans le milieu naturel – aliments, eau et air – ainsi que l’exposition due au rayonnement cosmique auquel nous sommes tous exposés.

À certains endroits, le rayonnement de fond est plus élevé qu’à d’autres, selon l’altitude à laquelle on se trouve, la nature du sol et le type de matériaux de construction qui ont été utilisés. Au cours des dernières années, il est devenu clair que la source ponctuelle la plus grande et la plus dangereuse de rayonnement de fond est le radon.

On estime que de nombreux cas de cancer et de défauts génétiques qui surviennent chez l’humain ont été causés par l’exposition inévitable au rayonnement de fond.

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K.5. Le rayonnement de fond va-t-il en augmentant?

À cause de l’activité humaine, l’exposition au rayonnement de fond augmente graduellement car des quantités de plus en plus grandes de matières radioactives naturelles sont libérées dans la biosphère (par exemple à cause des activités d’extraction minière).

Il faut également tenir compte de l’exposition inévitable de toutes les populations humaines aux retombées radioactives des essais d’armes nucléaires et des décharges de centrales nucléaires, particulièrement celles associées à l’accident grave survenu à Tchernobyl.

L’exposition aux rayons X dans le cadre d’examens médicaux fait également augmenter l’exposition moyenne au rayonnement. De plus, de petites quantités de radioisotopes utilisés à des fins médicales et industrielles (substances radioactives artificielles utilisées comme « traceurs » ou à des fins thérapeutiques) se retrouvent souvent dans le sol, l’eau ou l’air.

Bien que l’expression « rayonnement de fond » ne comprenne pas les retombées radioactives imputables aux bombes, les décharges des réacteurs, l’exposition aux rayons X dans le cadre d’examens médicaux ou la contamination environnementale due aux radioisotopes, il faut reconnaître que des personnes partout dans le monde sont exposées à des doses de rayonnement croissantes pour toutes ces raisons.

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K.6. Le radon dans les habitations pose-t-il problème? Comment s’y introduit‑il?

Aux États-Unis, au R.-U. et en Suède (mais pas encore au Canada), les gouvernements ont récemment forcé les citoyens à mesurer le radon dans leurs maisons afin d’assurer leur propre sécurité.

Le radon présent dans les habitations provient de faibles quantités de radium qui se trouve dans le sol ou dans les matériaux de construction. Le radon peut également pénétrer dans les maisons sous forme de gaz dissous dans l’eau du robinet. Il est naturel et inévitable de se trouver en présence d’une certaine quantité de radon, mais ce gaz demeure tout de même dangereux. Plus il y a de radium, plus le problème est important. Bien évidemment, dans les mines d’uranium et dans les résidus miniers, la quantité de radon est beaucoup plus importante que dans la plupart des habitations.

À certains endroits, comme à Port Hope (Ontario) et à Grand Junction (Colorado), des niveaux élevés de radon dans les maisons et les écoles ont résulté de l’abandon de résidus miniers d’uranium ou de la présence d’autres déchets d’uranium dans les matériaux de construction. Ailleurs, comme à Oka (Québec) et à St. Johns (Terre‑Neuve), des matériaux renfermant du radium ont été vendus à des constructeurs sans méfiance, ce qui a entraîné la présence de radon dans de nombreuses habitations.

Une étude médicale britannique récente (publiée en avril 1990 dans The Lancet) a démontré qu’il existait une corrélation importante entre les niveaux de radon élevés dans les maisons et certaines maladies graves comme la leucémie myéloïde chez les enfants, et le cancer du rein chez l’adulte. Cette étude utilise des statistiques publiées dans quinze pays, dont le Canada.

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K.7. Les normes canadiennes relatives à l’exposition au rayonnement sont‑elles plus rigoureuses qu’auparavant?

Au cours des dernières années, les autorités canadiennes ont relâché les normes en matière d’exposition au rayonnement plutôt que de les rendre plus rigoureuses. En moins d’une décennie, la concentration maximale admissible d’uranium dans l’eau potable au Canada a augmenté d’un facteur de neuf. La concentration maximale admissible d’uranium dans l’eau a également augmenté. [Une nouvelle réglementation proposée par la CCEA, qui n’avait pas encore obtenu le statut de loi en septembre 1990, augmentera la limite d’incorporation maximale admissible de nombreuses substances radioactives sur les lieux de travail.]

En attendant, dans de nombreux pays, les normes se sont resserrées parce qu’il existe de nouvelles preuves scientifiques qui indiquent que les risques d’exposition au rayonnement de faible intensité sont beaucoup plus élevés que l’on croyait il y a de cela quelques années. Au R.‑U., la limite maximale admissible proposée pour l’exposition au rayonnement des travailleurs a diminué de 40 pour cent par rapport à la limite canadienne actuelle. Aux États‑Unis et au R.‑U., la limite maximale admissible d’exposition au rayonnement pour les membres du public proposée est de beaucoup inférieure – d’un facteur de dix et plus – à la limite correspondante au Canada.

Les autorités réglementaires canadiennes n’ont jamais tenu d’audiences publiques en vue de fixer les normes relatives au rayonnement, en dépit du grand nombre de recommandations officielles en ce sens. Elles n’ont jamais compté de représentants du grand public au sein des organismes décisionnels. Il est ironique de constater que les normes relatives au rayonnement qui font maintenant l’objet de dispositions législatives au Canada sont fondées sur un rapport désuet publié par la CIPR en 1977, plutôt que sur des preuves scientifiques qui sont disponibles actuellement.

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