SYNTHÈSE DU
Colloque sur le nucléaire au Québec

pour jeter les base
d'une politique énergétique
efficace et socialement responsable

Un forum d'une journée,
tenu à Champlain le 19 août 2003

 

Organisée par
Z é r 0 N u c l é a i r e
et
Le Regroupement des travailleurs accidentés du nucléaire




PRÉSENTATION

C'est avec plaisir que nous acheminons les notes de la rencontre «Pour une Politique énergétique québécoise efficace et socialement responsable» ; cette rencontre avait lieu dans la municipalité de Champlain, le 19 août 2003. Cette rencontre découlait de la collaboration des comités de citoyens regroupés dans Zér0nucléaire, le Mouvement vert Mauricie et le Regroupement pour la surveillance du nucléaire.

Depuis cette rencontre, les bases d'un Forum québécois pour une Politique énergétique socialement responsable ont été mises en place ; la participation de tous les intéressé(e)s est souhaitée.

Prière de joindre M. Michel Fugère : mouvementvert@sympatico.ca

Nous en profitons également pour vous informer des progrès de la Campagne sortir du nucléaire. N'hésitez pas à faire circuler la résolution en annexe. En plus du texte de la résolution, il y a également en annexe la liste des organismes qui appuient cette résolution, les lettres acheminées aux Ministres, un communiqué de presse et de la correspondance avec Hydro-Québec

REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier M. Pierre Ferron, agronome, membre honoraire de l'Association des biologistes du Québec (ABQ) et membre du Groupe d'éducation relative à l'environnement (GERE), qui a consenti à éditer le présent document ; il a consacré plusieurs dizaines d'heures à cette tâche.

Nous remercions également M. André Bélisle de l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), pour avoir supporté financièrement la rédaction de ce rapport.

Enregistrement des exposés : Christiane Deschesnes

Transcription des débats : Dominic Thibeault

Correction et mise en page du texte : Pierre Ferron

LA RENCONTRE DE CHAMPLAIN

OuvertureOuverture oque avait pour objectif de jeter les bases d'une politique énergétique qui serait applicable au Québec et qui respecterait les principes du développement durable. Il est devenu urgent d'agir au moment où le projet de réfection de Gentilly-2 refait surface. La consultation de spécialistes bien au fait des diverses facettes du problème énergétique est maintenant nécessaire. Il faut également s'assurer que nos revendications soient bien entendues. Nous devons passer à l'action immédiatement pour favoriser l'émergence de projets alternatifs de production d'énergie ; mais il n'est pas question de brimer qui que ce soit.

Contrairement à ce qui était prévu à l'ordre du jour, Mme Julie Plamondon qui devait aborder le thème «Conservation de l'énergie et efficacité énergétique», était absente. M. Michel Fugère a simplement relaté certaines expériences réussies en la matière.

Exposé de Philippe Raphals

M. Raphals est consultant pour la firme indépendante Hélios Consultants. Il a entre autres été membre du secrétariat du projet environnemental Grande-Baleine au début des années 90. Il porte un intérêt particulier à la production hydroélectrique.

Des difficultés majeures de transcription ne permettent pas de reproduire l'intervention de M. Raphals.

Grâce à sa présentation, les participants à la rencontre ont pu suivre la petite histoire du Débat public sur l'énergie qui s'est déroulé en 1996.

La création d'une Régie de l'énergie et d'une Agence de l'efficacité énergétique, la Loi sur l'énergie et quelques autres sujets reliés à la bonne compréhension des enjeux énergétiques ont été abordés par le conférencier.

Pour en savoir plus, il suffit de rejoindre M. Raphals au Centre Hélios , au téléphone : 514.849-7091, et adresse courriel : raphals@centrehelio.org

M. Raphals étant invité par un auditeur à commenter le panne survenue dans le Nord-est des États-Unis et en Ontario, il dit qu'on ignore encore les causes de cette panne. Ça aurait commencé en Ohio à cause d'une mauvaise gestion du service public : une fluctuation de courant durant quelques heures, une grande instabilité, une alarme hors service ou très probablement une erreur humaine.

Intervention de Robert Del Tredici

Robert Del Tredici est un photographe documentaliste qui a consacré sa carrière à compiler des clichés de la culture de l'invisible, de l'industrie du nucléaire. La plupart des photographies N&B de ce rapport sont de Robert Del Tredici. Merci!

Son exposition de photographies est le résultat de plusieurs années de travail. On peut y voir des images décrivant l'origine de l'industrie nucléaire ; l'uranium, en effet, existe en tant que minerai dans le sous-sol.

PHOTO : Immense pelle mécanique servant à l'extraction de l'uranium (Photo Del Tredici)

L'uranium est utilisé de deux façons : dans les bombes, une fission rapide et énergétique et dans les réacteurs, une fission contrôlée et plus lente pour produire de l'électricité. Il s'agit de la même réaction, mais à deux ratios différents. L'uranium ressemble à une simple roche. Cet élément est le plus lourd sur la Terre, ce qui permet la fission.

GRAPHIQUE : Le processus simplifié de la fission de l'uranium

La première mine d'uranium au monde se situait dans les territoires du Nord-Ouest, sur la berge du Grand Lac de l'Ours. Les amérindiens dénés ont travaillé dans la mine. M. Del Tredici a eu la chance d'aller les rencontrer et de photographier les lieux. Beaucoup de ceux qui ont travaillé dans la mines sont décédés, mais il en reste quelques uns pour raconter leur expérience.

Sous terre, on dynamitait la roche. On attendait que la poussière retombe et ils allaient ensuite sortir la roche pour la transformation. Comme partout où on retrouve de l'uranium, plusieurs autres éléments radioactifs sont présents comme le radon, le radium ou le thorium. Lorsque la roche sort de la mine, elle est pulvérisée et mise en sac. Les dénés transportaient alors les sacs de poudre sur un bateau. Ils dormaient même durant la traversée du lac directement sur les sacs. La traversée du lac pouvait durer 10 heures.

Aujourd'hui, plusieurs déchets jonchent encore le site de la mine, dont des vieux sacs. Tous ces débris sont encore radioactifs puisque l'uranium a une demie vie d'environ 4,5 milliards d'années. Cette radioactivité du site peut facilement être révélée par des instruments de mesure.

PHOTO : Un mur de résidus d'extraction de l'uranium (arrière-plan) s'écoule dans Elliot Lake (Photo R. Del Tredici)

Sept-cents Denes vivent dans ce village. 1,7 millions de tonnes de résidus d'extraction d'uranium ont été déversés dans ce lac. Ces résidus sont très radioactifs et se sont déposés dans le fond. Ce lac est aujourd'hui reconnu pour la pêche sportive, des gens y viennent de partout pour s'adonner à leur sport sans savoir ce qui s'y cache.

On peut voir sur les photos de l'expositions divers sujets. Par exemple, des amérindiens du groupe Dene, sur le site où ils ont travaillé à l'époque de la mine. On voit, sur une autre cliché, une affiche qui dit que l'uranium extrait du site a été envoyé aux États-Unis pour le projet atomique.

Durant tout ce temps, la population Dene ne savait pas que l'uranium qu'ils récoltaient servait pour fabriquer des bombes. Ils ne savaient pas non plus que de transporter l'uranium pouvait être dangereux pour leur santé. Plusieurs sont tombés malades, entre autres de cancers, et ils sont morts des suites de leur exposition à l'uranium. Le gouvernement était pourtant au courant du danger puisqu'en 1931; une publication du ministère des Mines du Canada signalait aux travailleurs qu'une ingestion minime sur une longue période de temps de matériel radioactif pourrait causer une accumulation dans le corps et des problèmes majeurs de santé, comme le cancer du poumon, la nécrose des os ou l'anémie. Cette publication était cependant destinée aux travailleurs d'Ottawa qui manipulaient les échantillons de substances radioactives. Déjà, au début de l'aire nucléaire, on connaissait les risque reliés à cette technologie, mais on les cachait.

GRAPHIQUE : Les voies de contamination des humains par le nucléaire

Les dommages ne sont pas observables à court terme, seulement à long terme. Le bateau qui transportait le minerai sur le lac a été vendu à la communauté Dene pour la somme symbolique d'un dollar après son service. Ce bateau, comme tout le matériel utilisé à l'époque, est contaminé. De nos jours, les mines sont généralement à ciel ouvert, comme au nord de la Saskatchewan. À la mine, un centre de données informe les travailleurs du taux de radiation de la journée, comme on le ferait pour les prévisions ou les statistiques météorologiques.

L'industrie nucléaire s'est d'abord développée pour des fins militaires. Une photo de l'exposition montre un cratère causé par l'explosion d'une bombe sur un site d'essai au Nevada. Les débouchés commerciaux pour le nucléaire se sont ensuite développés.

GRAPHIQUE : Après une bombe nucléaire… au Japon

Pour la transformation de l'uranium, la roche passe dans un moulin afin d'y être pulvérisée. Elle passe ensuite dans une raffinerie pour y être purifiée. Il en sort un «gâteau jaune» ou «yellow cake». On le transforme ensuite en ce qu'on appelle le «OK liquor». De ces transformations, il reste toutes sortes de déchets, tous radioactifs. Un lac en Ontario, Elliot Lake, est rempli de résidus radioactifs de moulins. (Photo, page 5).

En ce qui concerne les études portant sur les dangers de cette industrie, la plupart font partie d'une catégorie qu'on peut appeler «barefoot epidemiology», c'est-à-dire exigées des citoyens. Une grande recherche avait été commandée par le gouvernement des États Unis pour démontrer l'absence de risques dans l'ensemble du programme nucléaire américain. Les résultats de cette étude sont restés secrets puisqu'ils n'ont pas confirmé l'hypothèse de travail.

Plusieurs populations ont été affectées par la radioactivité de l'uranium. Uranium City, au nord de la Saskatchewan, était une ville minière où on était fier de l'industrie du nucléaire dans les années 50. La mine et les moulins ont produit des résidus radioactifs. Aujourd'hui, Uranium City est une ville fantôme. Dans la ville de Port Hope en Ontario, on avait utilisé des résidus d'uranium pour la construction. Les bâtiments, y compris des écoles, étaient devenus radioactifs.

Le réacteur CANDU était conçu initialement pour produire du plutonium; chaque CANDU vendu dans le monde est une source de plutonium qui peut être utilisé pour fabriquer des bombes atomiques.

Des photos des gens de Three Mile Island figurent également dans l'exposition puisque l'artiste y a passé près d'un an après l'accident qui y est survenu. Un mois après l'accident, certaines personnes n'avaient pas conscience de ce qui se passait, en parlant comme s'il s'agissait d'un événement arrivé il y a très longtemps. Mais les gens qui se présentaient aux audiences publiques étaient très inquiets. Le «nettoyage» de la centrale les préoccupait principalement, puisque personne ne semblait savoir où allaient les déchets.

PHOTO : Intérieur d'un réacteur CANDU (Photo R. Del Tredici)

Les CANDU utilisent l'eau lourde et dégagent du tritium, un isotope radioactif de l'hydrogène. Le tritium, même s'il est beaucoup moins radioactif que le plutonium, peut tout de même causer des dommages s'il entre, par exemple, dans un poumon.

PHOTO : Entreposage des déchets hautement radioactifs dans une piscine (Photo R. Del Tredici)

Les déchets produits dans une centrale comme Gentilly-2 sont de trois intensités : hautement radioactifs, moyennement radioactifs et peu radioactifs. Les déchets hautement radioactifs, composés de combustible usé, sont stockés dans des piscines. Après quelques années, ils sont transférés dans des modules de stockage à sec. Plusieurs hypothèses ont été explorées pour se débarrasser de ces déchets. On a pensé les envoyer sur le soleil, les noyer au fond de l'océan ou les encastrer dans la roche du bouclier canadien. Mais toutes ces façons de faire sont soit irréalisables, soit inacceptables, soit les deux.

 PHOTO : Tunnel expérimental creusé dans le Bouclier canadien en vue de l'entreposage permanent des déchets radioactifs (Photo R. Del Tredici)

Selon M. Del Tredici, si quelqu'un vous dit que le nucléaire est propre parce qu'il ne produit pas de gaz à effet de serre, vous devez lui poser deux questions : que faites-vous avec les déchets et pourquoi ne pas se tourner vers des sources d'énergie alternatives qui comportent beaucoup moins de dangers?

Témoignage de M. Marcel Jetté

Marcel Jetté a travaillé à la centrale Gentilly-2 en 1971, 1993 et 1995.

GRAPHIQUE : Texte de l'Hebdo Journal du 5 oct. 2003

Depuis 1997, il sait qu'il a un cancer incurable. Il a fait plusieurs recherches pour apprendre que la sécurité des travailleurs à la centrale n'était pas adéquate. «Ils ont caché certains faits aux travailleurs, comme par exemple que l'exposition à toute dose de radiation comporte des risques. Aussi, ils nous ont fait croire qu'il n'y avait pas de danger avec l'exposition qu'on pourrait recevoir à la centrale.»

GRAPHIQUE : La capacité de pénétration des rayons alpha, beta et gamma émis par des substances radioactives

«Les doses qu'il nous était permis de recevoir à la centrale étaient de un (1) rem, et quand on en avait reçu 1, ils nous ont dit qu'on pouvait en recevoir 2. Les dosimètres aussi devaient être étudiés à Ottawa au bureau du registre des doses de radioactivité. Rien dans mon cas n'a été fait en ce sens là. C'est juste pour prouver qu'il y a eu des anomalies, des choses cachées.»

«À ce moment là, j'ai posé plusieurs questions à M. Michel Rhéaume quand il est venu essayer de nous vendre la réfection de la centrale nucléaire. M. Michel Rhéaume n'a pas été en mesure de me répondre. Par exemple, les autorités ne veulent pas admettre que M. René Lamothe, un ex-travailleur de la centrale, a travaillé à cet endroit en 1984 et qu'il a été contaminé à une jambe. Il a été renvoyé chez lui sans être décontaminé. Ce sont là des choses qui n'auraient pas dû arriver.»

«J'ai aussi demandé une enquête à la Commission de contrôle de l'Énergie atomique. On m'a dit qu'on ouvrait un dossier qui est certainement resté sur une tablette, car je n'ai plus reçu de nouvelles. Cela donne l'impression qu'on se butte à un cercle fermé où tout le monde se protège. Ils veulent que les centrales fonctionnent, ça garantit leur travail.»

GRAPHIQUE : La radioactivité persiste pour des milliers d'années après l'arrêt d'un réacteur comme le suggère l'illustration

Selon M. Jetté, trois ex-travailleurs ont fait des réclamations à Hydro-Québec. M. Lamothe n'a pas pu faire de réclamations puisque officiellement, il n'a jamais travaillé à la centrale. Après six ans, M. Jetté attend encore une réponse. Selon lui, Hydro-Québec laisse traïner les procédures pour éviter, advenant une victoire de M. Jetté, de créer un précédent. Plusieurs ex-travailleurs sont  décédés de maladies du coeur, qui peuvent être occasionnées par la radiation. «Le Docteur Gofman affirme dans ses exposés que les radiations ionisantes peuvent causer des mésothéliomes au coeur.»

«C'est très relié, avec la radioactivité. Ces personnes là ont été exposées. Certaines sont décédées de mésothéliomes; d'autres, plus récemment, ont eu des cancers. Je prétend qu'il y a des possibilités que ça soit relié. Je ne peux pas vous dire que mon cancer vient de la centrale nucléaire, mais que les expositions que j'ai subies à la centrale ont certainement quelque chose à voir avec ma maladie».

Un participant intervient : «J'ai des anciens collègues ici qui sont ressortis avec des opérations à répétition au dos, dans le bout de la colonne vertébrale. Cela peut être dû à des expositions sévères de bombardement gamma dans un premier temps. Il y a eu beaucoup de laisser aller dans ce qu'on appelle la petite contamination. On ne s'est pas occupé des rayons alpha ; on s'est pas occupé des poussières ou du radon. Il y avait toutes sortes de choses. En fait, on a été les cobayes qui ont expérimenté pour les gens qui sont présentement au travail. J'ai le droit de vivre comme les autres, mais ce n'est pas ce qu'on m'a permis jusqu'à maintenant. Ces gens là ont des grosses maisons, ils ont une sécurité, ce que je n'ai pas présentement. Je n'y ai pas droit car, à un moment, j'ai osé dire tout haut ce que les autres pensaient. C'est la seule job que j'ai pu faire ces vingt dernières années : demander des réponses à nos questions;  je le fais depuis que j'ai été chassé de la centrale et je vais continuer le faire.»

PHOTO : L'étoile noire au centre du tissu pulmonaire d'un singe, ce sont les traces laissées par le passage de rayons alpha émis par une particule invisible de plutonium (Photo R. Del Tredici)

M. Marcel Jetté poursuit en notant qu'il est écrit dans le programme d'Hydro-Québec que les travailleurs sujets à des expositions aux radiations doivent passer un examen médical avant les travaux et un suivi médical ensuite. Il dit ne jamais avoir eu de suivi médical à la suite des travaux. La même chose est arrivée à Chalk River, où les ex-travailleurs qui ont été exposé n'ont jamais eu de suivi médical. «Ça n'a pas l'air important, puisqu'ils pourraient découvrir des anomalies dans le sang. Un recours contre eux serait alors beaucoup plus facile.»

PHOTO : Une ville entière, voisine de la centrale de Chernobyl, fermée à la suite de l'accident de 1986

Exposé de Gordon Edwards, Ph.D.

M. Gordon Edwards est président du Regroupement pour la surveillance du nuclaire (Canadian Coalition for Nuclear Responsibility); il est aussi professeur de mathématiques au Collège Vanier de Montréal. Depuis plusieurs années, il a agi comme consultant en nucléaire auprès d'organismes gouvernementaux ou d'ONG

Dr Edwards veut discuter de la situation nucléaire car, même si cette technologie ne représente pas une grande partie de l'approvisionnement en énergie au Québec, les problèmes associés au nucléaire sont très significatifs et beaucoup plus importants que l'énergie produite par cette centrale.

Il commence par mentionner l'histoire du dossier nucléaire au Québec. En 1978, un moratoire est imposé par le gouvernement Lévesque sur les réacteurs nucléaires au Québec. Ce moratoire excluait les centrales Gentilly-2, en construction, et Gentilly-3, pour laquelle le gouvernement s'était engagé.

Il est important de comprendre que, environ deux ans auparavant, Hydro-Québec avait planifié la construction d'environ 30 réacteurs nucléaires le long du fleuve Saint-Laurent; certains sites étaient d'ailleurs choisis. Ces plans d'Hydro-Québec étaient susceptibles d'affecter les citoyens et ceux-ci se sont vite mobilisés. Un groupe existant à cette époque a organisé une grande manifestation réunissant beaucoup de gens qui se sont présentés au site de Gentilly en voiture, en camion et en autobus. Les organisateurs ont animé des ateliers sur le nucléaire pour informer le public.

Un peu plus tard, le Regroupement pour la surveillance du nucléaire a préparé une mémoire détaillée contre le nucléaire et elle fut soumise au gouvernement (Commission permanente sur l'énergie). Elle contenait les conclusions sur les désavantages, les difficultés et les dangers du nucléaire; mais elle offrait aussi des opportunités pour d'autres sources d'énergie renouvelables, comme l'éolien, le solaire et l'efficacité énergétique. Évidemment, c'est la population du Québec qui a pris le leadership dans la lutte contre le nucléaire; l'exemple qui suit illustre également le rôle important des citoyens en matière de nucléaire.

GRAPHIQUE : L'option du solaire fut mise de l'avant dès les années 70

Dans les années 80, le gouvernement des États-Unis a pris l'initiative osée de placer des déchets hautement radioactifs, c'est-à-dire du combustible nucléaire irradié, dans les montagnes du Vermont, près de la frontière du Québec. Encore une fois c'est la population de l'Estrie qui s'est mobilisée et qui est allée au Vermont participer aux manifestations et aux réunions publiques. Le gouvernement américain était très étonné de cette participation. Finalement, le gouvernement Bourassa a annoncé une Politique qui ne permettrait aucun dépotoir permanent de déchets hautement radioactifs au Québec ou près de ses frontières.

Plus tard, Énergie atomique du Canada a proposé de construire gratuitement un petit réacteur nucléaire, qui se nomme le Slowpoke, à Sherbrooke, permettant de produire de l'eau chaude pour le chauffage des édifices et la production des isotopes pour des fins de recherche. Le Conseil d'administration de l'Université de Sherbrooke a approuvé unanimement le projet.

Pendant l'année suivante, la population locale de Sherbrooke s'est mobilisée contre ce projet; parmi les opposants, on rencontrait des agriculteurs, des étudiants et des professeurs, des infirmières et des écologues. Le Dr Edwards et son groupe ont participé à cette lutte. Finalement, le même Conseil d'administration a alors, cette fois, refusé unanimement le projet. Un organisme de l'Estrie a publié un document : «David contre le Goliath nucléaire» pour expliquer en détail comment cette lutte a été menée et gagnée; il s'agissait de diffuser une procédure gagnante à l'intention des gens des autres régions du Québec.

Le Dr. Edwards est donc très optimiste en ce qui concerne la capacité de la population à se faire entendre par le gouvernement. Il pense qu'on doit apprendre du passé.

Le Dr. Edwards décrit maintenant la situation présente avec Gentilly-2. Comme tous les réacteurs CANDU, il souffre de vieillissement accéléré par la radiation. Comme résultat, les matériaux de construction deviennent friables, ce qui soulève des problèmes de sécurité. Par exemple, il est nécessaire, dans le coeur du réacteur, de maintenir un refroidissement du combustible, même si le réacteur est fermé; sinon la radioactivité dans le réacteur est si intense qu'elle continue de générer beaucoup de chaleur même après que le processus de fission soit terminé. Ainsi, lorsqu'un bris de tuyau de refroidissement survient, les conséquences peuvent être très graves ou même catastrophiques. Lors de l'accident de 1979 survenu à Three Miles Island (TMI), la réaction nucléaire (fission) s'est arrêtée immédiatement, mais le coeur du réacteur a commencé à fondre quelques heures plus tard.

Lorsque les matériaux souffrent de vieillissement, cela soulève un problème de sécurité, mais également des difficultés de production; il devient de plus en plus difficile de produire de l'énergie à pleine capacité. Hydro-Québec doit donc maintenant fermer le réacteur pour reconstruire toutes les composantes de l'intérieur du réacteur, en particulier les tuyaux qui se nomment les tubes de force et les tuyaux connexes, les tuyaux d'alimentation. On fera aussi d'autres changements sur certaines composantes liées aux systèmes d'urgence par exemple.

Le coût de ces réparations, selon les autorités du Nouveau-Brunswick (New Brunswick Power Corporation) aux prises avec un réacteur CANDU affligé des mêmes problèmes de vieillissement, s'élève à plus de 800 millions de dollars. L'estimation provisoire de la période d'inactivité serait de 18 mois mais, par le passé, en Ontario notamment, il a fallu des interruptions 2 à 4 fois plus longues. La radioactivité près du coeur du réacteur est si intense qu'il est nécessaire de réduire le temps de travail de chaque travailleur.

Hydro-Québec planifie la fermeture temporaire du réacteur dès 2008 pour effectuer les travaux de réfection; elle pourra ensuite continuer de produire de l'électricité et des déchets hautement radioactifs pour encore 20 ou 30 ans. La première autorisation que Hydro-Québec doit obtenir est celle de la construction d'un site d'entreposage des déchets hautement radioactifs. Il y a présentement deux sites d'entreposage sur les lieux; le premier sert pour les déchets hautement radioactifs, soit le combustible irradié, et ce site est à l'extérieur de la centrale. À l'intérieur de la centrale, il n'y a que l'espace requis pour environ quinze années de production. Le second site contient des déchets moins radioactifs, comme le matériel contaminé; les filtres, par exemple, accumulent beaucoup de radioactivité. Hydro-Québec veut agrandir ce site aussi. De plus, Hydro-Québec veut créer un nouveau site pour entreposer les composantes irradiées et l'équipement contaminé qu'on retirera du réacteur; ils sont très radioactifs, tout juste moins que le combustible usé.

PHOTO : Silos servant à l'entreposage à sec des déchets hautement radioactifs à Pointe Lepreau (Photo R. Del Tredici)

Il est possible de répondre négativement à cette requête d'Hydro-Québec; on peut affirmer qu'au Québec, on ne veut plus du nucléaire et on souhaite dépenser ces 800 millions dans des options énergétiques sécuritaires et renouvelables. Plusieurs études ont prouvé que, par exemple, c'est dans l'efficacité énergétique qu'un investissement est le plus rentable. «Imaginez ces 800 millions investis dans l'efficacité énergétique.»

Le Dr Edwards mentionne ensuite trois processus qu'il est important de connaïtre pour bien comprendre les problèmes associés au nucléaire. Le premier mécanisme discuté est la fission.

La fission est l'essence de la bombe et de l'énergie nucléaire. Elle se produit seulement avec deux substances, un type d'uranium et du plutonium. Il serait impossible de construire une bombe atomique ou de faire fonctionner un réacteur sans ces deux substances. La fission s'effectue en brisant les atomes, ce qui libère de l'énergie. Mais en brisant les atomes, on produit aussi des centaines de sous-produits radioactifs, les produits de fission. Ils sont des millions de fois plus radioactifs que l'uranium original. Par exemple, on pourrait montrer aux gens, en toute sécurité, une grappe de combustible avant son irradiation; mais les personnes s'approchant de la même grappe sortant du réacteur, sans protection, recevraient une dose létale de radiation en dedans de vingt secondes.

Dans un réacteur, on compte environ 300 tubes de force qui contiennent chacun 8 grappes de combustibles; c'est le cas de la centrale de Gentilly-2. Les grappes sont changées aux 3 ans, puisque après cette période, l'accumulation d'impuretés hautement radioactives dans les grappes (césium, strontium, etc.) fait diminuer l'efficacité de la réaction. Le combustible usé est appelé déchet hautement radioactif. En 1978, une étude a démontré qu'une grappe de combustible usé provenant d'un réacteur CANDU reste très toxique pour une période de 17 millions d'années et plus. C'est un problème puisque cette période de temps est plus longue que la civilisation humaine, et les gens ont tendance à l'oublier! Le problème demeure cependant entier; jusqu'à maintenant, il n'y a aucun moyen de détruire ces déchets. On peut en extraire des substances ou les transformer, mais la science n'a aucune technologie pour neutraliser ces déchets.

GRAPHIQUE : L'atome et ses composantes élémentaires
Affiche illustrant la réalité de la transmutation par les neutrons

Le deuxième mécanisme décrit par le Dr. Edwards est celui de la transmutation des éléments causée par les neutrons. Dans le réacteur, les neutrons sont absorbés par les atomes environnants (dans l'acier, le béton, etc.). Ces matériaux deviennent alors radioactifs; la raison pour laquelle les tuyaux sont eux-mêmes radioactifs, c'est par transmutation des atomes métalliques. On pourrait dire que ce phénomène est à l'opposé du recyclage, puisque tous ces matériaux ne peuvent plus servir ensuite. «Le nucléaire, c'est l'ultime société du gaspillage.»

Le réacteur lui-même devient donc un déchet radioactif. Ces matériaux de haute qualité ne peuvent plus servir, quelque soit l'usage; ça devient alors un problème que de démanteler ces structures. Des tonnes de déchets radioactifs seront produits, et personne ne sait où ces déchets seront envoyés.

Une des substances produite par transmutation est le plutonium, bien connu comme l'explosif principal dans les armements nucléaires; le plutonium est créé dans le réacteur nucléaire et il reste dans le combustible irradié. Pour utiliser le Plutonium, on doit donc l'extraire de ce combustible usé, comme ça se fait par exemple en Corée du Nord. Les premiers réacteurs étaient construits principalement pour cette production de plutonium, même ici au Canada. Ainsi, le plutonium produit en 1944 à Chalk River servait pour les programmes d'armements nucléaires américains et britanniques; c'est par la suite qu'on a décidé d'utiliser la chaleur pour générer de la vapeur, qui servira à produire de l'électricité. Environ le tiers de la chaleur produite par la réaction nucléaire est utilisée pour la production d'énergie électrique. Le reste est perdu et dissipé dans l'environnement.

Comme le plutonium est la substance clé dans la fabrication des bombes, la dispersion des réacteurs nucléaires contribue à augmenter sa disponibilité. Par exemple, l'Inde a utilisé du plutonium canadien pour ses premières bombes. L'Inde a construit des dizaines de réacteurs en reproduisant les plans du CANDU; ce pays dispose d'un surplus considérable de plutonium déjà extrait du combustible usé, plutonium disponible, si désiré, à des fins militaires.

GRAPHIQUE : Le spectre du champignon atomique est de retour

À Gentilly-2, on produit constamment du plutonium, et il est nécessaire d'avoir des inspecteurs de l'UNO qui s'assurent que personne ne l'utilise à mauvais escient. Comme le plutonium a une demi-vie de 24 000 ans, il reste disponible tout ce temps pour des fins militaires…, même longtemps après que les réacteurs eux-mêmes ont été fermés, démantelés, et totalement oubliés.

Le troisième processus est la radiation. Elle est largement expliquée dans les différents ouvrages présentés par le Dr Edwards; pour de plus amples renseignements, visitez le site Internet du Regroupement pour la surveillance du nucléaire : www.ccnr.org.

En réponse à des questions de l'auditoire, le Dr Edwards précise que le site proposé d'entreposage des déchets hautement radioactifs aux États-Unis, site proclamé comme étant le plus efficace, que ce meilleur site n'est peut-être pas encore suffisant pour cette tâche. Il cite un physicien suédois, le Dr Hannes Alfven, gagnant d'un prix Nobel, en disant sur ce sujet que «on ne peut prétendre qu'un problème est résolu seulement en indiquant tous les efforts qui ont été faits pour le résoudre».

Le problème découle du fait que, compte tenu de la durée de vie des déchets radioactifs, durée qui dépasse même celle de la présence humaine sur cette terre, on ne peut prévoir ce qui arrivera dans l'avenir. Ainsi, même des couches géologiques qui n'ont pas été perturbées durant des millions d'années comme dans le Bouclier canadien, ne peuvent garantir l'entreposage sécuritaire de déchets aussi dangereux; on peut craindre un affaiblissement de la résistance du roc, car les excavations nécessaires pour l'enfouissement des déchets vont devenir autant d'issues potentielles vers la surface. Ces failles n'existaient pas auparavant; la chaleur qui se dégagerait des déchets durant des milliers d'années pourrait agir plus facilement sur la roche, profitant de ces fissures supplémentaires.

De plus, on ne peut prédire par exemple, ce que sera l'intensité des prochains tremblements de terre; les décisions que nous prenons aujourd'hui affecteront les générations futures. «Nous n'avons pas le droit de prendre ces décisions irrémédiables.» La géologie n'est pas une science de prédiction; aussi, dans ce débat, comme nous ne sommes pas absolument certains, on ne peut pas prendre cette décision d'enfouir dans le Bouclier canadien. Dans la situation actuelle, il faut arrêter de produire de tels déchets tout en gardant en place ceux que nous avons déjà, ce tant qu'une véritable solution ne sera pas trouvée.

Il est possible qu'à force d'investissements, nous trouvions une solution à ce problème, mais pour l'instant la science devrait admettre que c'est un problème non résolu. L'aspect éthique doit aussi être considéré, celui de la disponibilité du plutonium, par exemple. «On doit sortir de cette industrie du nucléaire et utiliser les ressources de la société pour résoudre les vrais problèmes énergétiques, par exemple en investissant dans l'efficacité énergétique.»

GRAPHIQUE : Affiche invitant à sortir du nucléaire

Pour ce qui est des coûts de fermeture de Gentilly-2, il s'agirait d'une facture beaucoup moins élevée que celle de sa réfection; de plus, cette décision devra être prise un jour inévitablement. Il serait préférable de le faire maintenant pendant que l'industrie du nucléaire est encore présente. Le gouvernement du Québec devrait aussi demander au gouvernement du Canada de démanteler Gentilly-1, qui relève de sa responsabilité. Hydro-Québec pourra bénéficier de l'expérience du démantèlement, puisque plusieurs autres réacteurs fermés devront être démantelés dans le monde dans un avenir prochain, une centaine selon les chiffres de l'Agence internationale d'énergie atomique. Ces techniques robotiques seraient aussi transposables dans d'autres industries. La création d'un fonds est requise par la Commission de contrôle pour garantir les argents nécessaires au démantèlement des sites et à l'entreposage des déchets, mais généralement l'argent accumulé ne suffit pas.

Questionné sur le phénomène de fusion nucléaire, le Dr Edwards répond que la fusion ne produirait pas de déchets hautement radioactifs, c'est-à-dire de combustible irradié, mais ce type de réaction n'a pas été démontré et est peut-être non-réalisable; la principale difficulté viendrai du fait que la réaction produit des neutrons qui sont trois fois plus énergétique et elle produirait beaucoup plus de transmutations. Donc, les matériaux servant à la fabrication deviendront hautement radioactifs. On le voit, cette technologie n'est pas la solution; nous devrions, face au problème énergétique, adopter une gestion plus décentralisée de la production, avec des sources alternatives plus diversifiées et plus renouvelables.

PHOTO : Réacteur CANDU en construction

Concernant la situation vécue en France, dans beaucoup de cas, les cours d'eau ont un débit restreint et ils peuvent être affectées par la pollution thermique des réacteurs; si l'eau est trop chaude, elle ne peut pas refroidir efficacement les réacteurs. C'est ce qu'on a observé lors de la canicule cet été; avec l'avènement des changements climatiques, cette situation risque de devenir très problématique.

Les seuls marchés pour les réacteurs nucléaires sont maintenant l'Europe de l'Est et l'Asie. En Amérique du Nord, il n'y a eu aucune vente d'une nouvelle centrale nucléaire depuis 1978. Mais les vendeurs de réacteurs ne disent pas toute la vérité; il est honteux de vendre des réacteurs CANDU à des pays comme la Bulgarie ou la Roumanie en sachant toutes les frais qu'ils occasionnent et tous les problèmes qu'ils causent.

Présentation de Steven Guilbeault

M. Guilbeault, de Greenpeace International, est affecté entre autres aux sujets touchant le Protocole de Kyoto, les relations entre cet accord et les autres filières énergétiques, ainsi que les solutions qui se rattachent à ces problématiques environnementales.

Le protocole de Kyoto reconnaït que l'activité humaine est en train de bouleverser le climat de la planète. Puis, au début juillet, l'Organisation météorologique mondiale a émis un communiqué disant que les changements climatiques qu'on observe autour du globe tendent à démontrer que le réchauffement de la planète est déjà arrivé. Ce communiqué a été émis quelques semaines avant la canicule en Europe, avant les feux de forêts en Colombie Britannique et avant les inondations au Québec. De plus l'Organisation météorologique mondiale est un organisme de gauche, habituellement prudent dans ses conclusions. Il est donc très inquiétant d'entendre des gens comme eux prendre position de la sorte.

Sur la base du protocole de Kyoto, le gouvernement canadien a tenu des audiences publiques qui ont conduit à la préparation d'un plan d'action sur les changements climatiques. Une des grandes questions soulevées lors des audiences publiques portait sur l'utilisation possible du nucléaire pour rencontrer les objectifs fixés. La question a été réglée à Bonn lors d'une réunion de la Communauté internationale concernant les changements climatiques. On y a jugé que le nucléaire n'est pas une technologie acceptable puisqu'il ne respecte pas les principes du développement durable. L'industrie nucléaire canadienne soutient au contraire, dans certains médias, que le nucléaire fait partie de la solution au problème des changements climatiques, alors qu'il ne figure nullement dans le Protocole de Kyoto ou dans le Plan d'action canadien contre les changements climatiques. M. Guilbeault a d'ailleurs défié quiconque de lui dire à quel moment le Gouvernement aurait pris un tel engagement.

Il faut donc se demander ce qu'on fera si on ne peut pas utiliser le nucléaire. Hydro-Québec nous présente donc un choix fictif. Cette entreprise nous propose des options comme les petites centrales au fil de l'eau, les centrales thermiques au gaz ou les méga projets au nord du Québec. Par exemple, lors des audiences publiques concernant la centrale du Suroït, une centrale au gaz, notre message était que le Québec n'a pas besoin du thermique.  Le BAPE nous a donné raison, en particulier pour atteindre les objectifs de Kyoto. Il s'agit là d'un choix inexistant. Plusieurs pays ont pris la décision de se sortir du nucléaire. Dans le cas de l'Allemagne, cette décision est jumelée à un engagement d'abandonner le charbon et de réduire ses émissions de CO2 de 25%; le Canada, pour sa part, s'est engagé à une faible réduction de 6%. L'Allemagne a installé, l'an dernier seulement, 3000 mégawatts de puissance éolienne; en 6 ans, pour le Québec, c'est seulement 100 mégawatts. Parmi les pays utilisant le plus l'énergie éolienne, notons par exemple le Japon et l'Inde.

GRAPHIQUE : Parc d'éoliennes, une source alternative(Q-Sc)

Greenpeace a produit une série de rapports concernant la gestion de l'énergie dans le futur, dont l'un concerne l'énergie solaire, et un autre, l'énergie éolienne. Ces rapports suggèrent qu'au cours des cinquante prochaines années, nous pourrions produire 40 % de l'énergie dans le monde avec ces deux sources d'énergie : le solaire et l'éolien. Et on ne parle pas des gains possibles grâce aux efforts d'efficacité énergétique ou aux autres technologies.

Pour Greenpeace, le nucléaire n'est pas une solution à nos problèmes d'énergie. L'ONU a étudié de nombreux scénarios incorporant le nucléaire comme source d'énergie et cet organisme en est venu à la conclusion que cette option présentait trop de risques pour notre sécurité, ce même avant les événements du 11 septembre 2001. Greenpeace a presque réussi à acheter une arme nucléaire au moment de la chute du Bloc soviétique; si Greenpeace a pu quasiment le faire, d'autres organisations franchement terroristes ont possiblement tenté l'aventure.

Les choix que nous propose le gouvernement du Québec ne favorisent pas le développement durable. Il existe beaucoup d'autres technologies; les exemples sont nombreux. Le manque de volonté politique fait en sorte qu'on ne nous propose pas ces choix véritables.

GRAPHIQUE : Le problème de la disposition des déchets nucléaires radioactifs demeure entier

Suite à une question d'un auditeur qui demandait ce qu'on devrait faire avec les déchets radioactifs, M. Guilbeault précise que la position de Greenpeace à cet effet est claire; il faut les gérer là où ils sont produits. En limitant le transport, on évite des inconvénients comme les risques d'accidents ou d'actes terroristes. Il faut également investir dans la recherche d'une solution définitive pour ce problème.

M. Guilbeault rappelle qu'on tente souvent d'appliquer de vieilles solutions à de nouveaux problèmes. Les changements climatiques brouillent les cartes à plusieurs niveaux, comme par exemple au niveau énergétique ou au niveau de l'utilisation du fleuve Saint-Laurent.

Il faut donc commencer à rapprocher les lieux de production des lieux de consommation. Chaque bâtiment peut devenir un petit producteur d'énergie avec le solaire, l'éolien ou le géothermique. Avec les vieilles solutions, on se condamne à voir revenir les vieux problèmes.

En matière efficacité énergétique, les gains potentiels sont très importants. Mais, au Québec, le faible prix de l'énergie électrique n'encourage pas la réduction de la consommation; sans nécessairement augmenter les tarifs, l'État devrait entreprendre une campagne de conscientisation en matière d'économie d'énergie.

Questionné à propos du Protocole de Kyoto, M. Guilbeault termine son intervention en rappelant qu'avec cet accord, les industries qui polluent l'air devront payer leur droit de polluer. Elles deviendront donc moins compétitives par rapport aux autres industries moins polluantes. Ce mécanisme suggèrera également la réduction des émissions pour atteindre une plus grande efficacité. Aux U.S.A. , plusieurs États ont mis en place des processus permettant de réduire les émissions des gaz à effet de serre.

Les grands producteurs d'énergies alternatives ne sont pas toujours bien connus; par exemple, dans le secteur de l'éolien, le Texas et l'Alberta sont les plus gros producteurs dans leurs pays respectifs. En réalité, beaucoup d'innovations très intéressantes se développent aux États Unis; il faudrait peutêtre revoir notre perception à leur endroit.

Période de discussion avec M. Michel Fugère

M. Michel Fugère est membre du Mouvement vert de la Mauricie. Il intervient notamment en l'absence de Mme Julie Plamondon qui devait aborder le thème «Conservation de l'énergie et efficacité énergétique».

M. Fugère a relaté certaines expériences réussies en matière de conservation de l'énergie et d'efficacité énergétique.

Il a donné l'exemple de la Commission scolaire de l'Énergie; une de ses écoles, la polyvalente des Chutes, a récemment atteint un objectif de réduction de plus de 60% de sa consommation d'électricité. De plus, sa réduction de la consommation d'hydrocarbures a baissé de 18%. Il a fallu un investissement de 450 000 $ qui a facilement été amorti en moins de deux ans.

Il a aussi rapporté une intervention auprès de 2 000 foyers de Shawinigan qui s'est soldée par des économies d'énergie. Plusieurs autres retombées positives n'ont pu être mesurées, comme les impacts sur la santé des citoyens ou sur la consolidation du tissu social de la communauté. Il serait donc facile de remplacer le nucléaire par l'efficacité énergétique, puisque des gains très importants peuvent être accomplis. Il s'agit là d'une voie d'avenir.

Pour plus d'informations sur ce dernier sujet, il suffit de contacter : Mme Julie Plamondon au Service d'aide aux consommateurs, au téléphone : 819.537-4752 et à l'adresse courriel : julie.plamondon@cgocable.ca

M. Michel Fugère, Mouvement vert Mauricie, au téléphone : 819.532-1717 et à l'adresse courriel : mouvementvert@sympatico.ca

L'efficacité énergétique est cependant un choix politique qui est écarté par le gouvernement; et ce, malgré le fait qu'aujourd'hui plus d'études et de recherches ont été faites pour prouver l'efficacité de cette méthode. L'occasion est excellente pour acheminer au Conseil d'administration d'Hydro-Québec, cet automne, un nouveau concept administratif : la conservation, l'efficacité énergétique et la gestion décentralisée doivent devenir des orientations politiques prioritaires dans la gestion de l'énergie au Québec.

L'investissement requis lors de la construction d'un barrage ou d'une centrale est très important et il ne rapporte que plusieurs années plus tard; avec la filière éolienne, c'est très différent, comme nous montre d'ailleurs l'exemple allemand.

Il faut penser à décentraliser l'approvisionnement en énergie électrique, tenter d'assurer l'approvisionnement local en énergie. Et une autre façon d'y arriver rapidement passe par la récupération du méthane sur les sites d'enfouissement sanitaire; ce gaz peut même servir à produire de la bi-énergie.

Le réseau électrique d'Hydro-Québec perd beaucoup d'énergie. Le rendre plus efficace pourrait permettre la récupération de plusieurs négawatts, ces mégawatts que l'on évite de produire en conservant l'énergie déjà produite.

Témoignage de M. Alain Saladzius

M. Saladzius dirige l'organisation «Sauvons nos rivières».

Cette organisation s'oppose à 36 projets de petites centrales sur des sites naturels, des chutes et des rapides par exemple. L'organisation a cru à une victoire quand le gouvernement Landry a fait marche arrière sur tous les projets. Avec l'arrivée du gouvernement Charest, ils ont vu plusieurs promoteurs refaire surface. La campagne reprend donc, en association avec plusieurs autres groupes, pour faire obstacle à ces projets; et encore avec des artistes comme têtes d'affiche. Le raisonnement utilisé pour contrer ces projets est le même que celui qui est utilisé contre le nucléaire : nous n'avons pas besoin de ces centrales et il serait beaucoup plus utile d'investir, par exemple, dans l'efficacité énergétique.

Le problème énergétique, comme la panne vécue au Nord-est des États-Unis et en Ontario, n'en est pas un de production, comme l'a dit Jean Charest, mais un de distribution. L'approche décentralisée pourrait donc réduire le risque qu'une autre panne majeure comme celle-là se reproduise.

Le message doit être connu, mais les tribunes sont rares. Les coups d'éclats, comme ce colloque, sont nécessaires. Il faut généralement mettre beaucoup plus d'énergie pour convaincre les médias, par rapport au temps requis pour faire fonctionner l'organisme.

Témoignage de Anne-Marie Beauregard

Mme Beauregard est une résidente de Champlain et elle fait partie de l'association «Zér0nucléaire».

Elle raconte comment sa fille, présidente de l'Association Séjour Enfants Tchernobyl, accueille chaque année la petite Marina, 8 ans. Cette enfant de Biélorussie est exposée à tous les jours à la radiation laissée par les événements bien connus de cette zone, soit l'accident à la centrale nucléaire en 1986.

Les aliments produits dans les zones affectées de Russie sont contaminés

Les gens de cette région n'ont, à l'époque, pas eu conscience de ce qui se déroulait chez eux puisque le nuage toxique qui s'y développait n'était pas visible. Quelques jours après l'accident, les gens fêtaient le mois de mai comme d'habitude, sans savoir que rien ne serait plus comme avant chez eux.

Plusieurs personnes ont été déportées, mais les conditions dans lesquelles elles vivent présentement ne sont en rien comparables à celles qu'elles avaient avant l'accident.

M. Senay est porte parole de cette association; il n'a malheureusement pas pu venir participer au colloque. À chaque année, il rassemble des artistes qui montent un spectacle à Sherbrooke pour amasser des fonds pour cette cause.

Il y avait au début 35 familles impliquées, mais le nombre a diminué graduellement avec les années. C'est que les parents d'accueil doivent défrayer les coûts d'hébergement pour les 10 semaines de séjour, les dépenses personnelles de l'enfant ainsi que son billet d'avion.

Les enfants viennent ici pour se refaire un peu une santé. L'air y est plus pur, et les aliments qu'ils mangent ne sont pas contaminés. Environ 800 000 enfants de 8 à 15 ans vivent dans la zone touchée. Les aliments qu'ils consomment sont contaminés. Malgré le fait que la catastrophe remonte à 1986, la zone n'est pas décontaminée.

PHOTO : Un sarcophage de béton qui recouvre le réacteur 4 de Chernobyl laisse passer des contaminants

Conférence : Le nucléaire et la santé, avec le Dr. Michael Dworkind

M. Dworkind, médecin, est membre de Médecins pour la survie mondiale, un organisme qui s'est mérité le prix Nobel de la paix en 1985; il est également professeur-adjoint de médecine familiale à l'Université McGill.

Comment un médecin généraliste en vient-il à s'impliquer dans le mouvement anti-nucléaire? Un homme de 49 ans s'est un jour présenté au bureau du Dr. Dworkind avec un problème de cancer de la peau à répétition; le Dr Dworkind lui demande alors comment c'est arrivé? L'homme lui répond que c'est arrivé à Chalk River, en Ontario, lors d'un accident dans une centrale nucléaire. Le gouvernement avait alors demandé aux militaires d'entrer pour tout nettoyer.

Une amie lui a ensuite fait visionner un vidéo qui allait changer sa vie. Il s'agissait de la conférence d'une femme médecin d'origine australienne et travaillant à Boston; elle était engagée dans la lutte contre le nucléaire; son nom est Dr Helen Caldicott, la présidente de l'organisme américain Physicians for Social Responsability (FSR). Elle en venait à la conclusion que tous les médecins devaient s'impliquer contre le nucléaire dans leurs pays respectifs.

Des médecins pour la paix (membres du FSR), durant les années 50, ont un jour mesuré le strontium accumulé dans les dents des enfants. Le taux de strontium est significativement plus élevé pour les époques où des essais nucléaires avaient lieu à l'air libre. Ce sous-produit de la réaction nucléaire peut, on le sait, causer le cancer des os.

Le Dr Dworkind a alors invité cette militante pour une conférence à Montréal devant les médecins de l'Université McGill et pour une présentation. Elle décrivait ce qui se passait vraiment dans les mines ou dans les centrales; les gens qui l'ont entendu ont été bouleversés. Deux cinéastes de l'ONF se trouvaient dans la salle et ont décidé de produire un documentaire traitant de ce sujet. Le film en question porte le titre évocateur : «Si la planète vous tient à coeur»; il s'agit d'une très bonne interprétation de son exposé et, malgré le fait que le film dérangeait beaucoup aux État-Unis, il s'est mérité l'Academy Award pour le meilleur documentaire étranger.

Après le visionnement de ce film, de jeunes militants ont décidé de le diffuser auprès de jeunes étudiants de tout le Canada; ils ont traversé le pays, s'arrêtant dans les écoles secondaires un peu partout. Un autre film portant sur cette tournée a vu le jour, c'est «mile zero». Dans les écoles visitées, des chapitres de SAGE, «Students against global extinction», ont été fondés; chaque étape de ce voyage à travers le pays donnait une nouvelle tribune aux jeunes; ils purent exprimer leurs inquiétudes à ce sujet et renouveler leur l'espoir de trouver une solution. «Ces petites histoires donnent le courage de continuer», d'ajouter Micheal Dworkind.

Cependant, pour plusieurs personnes des pays de l'Ouest, à cette époque la bombe atomique était une force qui garantissait les valeurs de la démocratie et qui tenait à l'écart la menace communiste; pour ces raisons, ils appuyaient le recours au nucléaire. Mais la doctoresse disait que cela était une attitude insensée; elle avance même des chiffres voulant que, pour chaque habitant dans le monde, il existe l'équivalent de 4,5 tonnes de dynamite sous force de force de frappe atomique.

Le groupe Médecins pour la survie mondiale s'est vu remettre, en 1985, le prix Nobel de la paix; deux grandes raisons justifient le choix de cet organisme : premièrement, ce groupe associe autant des médecins de l'Est que de l'Ouest; de plus, 65 pays sont représentés dans ce groupe et les médecins de tous ces pays se rencontrent périodiquement. Cependant, dans les années 80, les relations avec les médecins des pays communistes étaient plus difficiles.

L'organisme Médecins pour la survie mondiale a toujours privilégié un discours basé sur une approche scientifique, et cela a joué en leur faveur au moment de l'attribution du prix Nobel. Ainsi, des études sur les conséquences du bombardement d'Hiroshima ou sur les effets possibles, à court ou à long terme, d'une attaque avec des armes de 10 Mtonnes sur une grande ville ont été réalisées; aucune solution médicale n'est possible dans un tel cas. La seule option possible est alors la prévention.

«Nous voulons tous le meilleur des mondes pour nos enfants, sans violence, sans pollution. C'est pour ça que je travaille comme activiste; c'est pour tenter de guérir la planète,» d'ajouter Dr Dworkind.

Quelques images de la journée de conférences

PHOTO : Participants attentifs lors de l'exposé de Alain Saladzius 

PHOTO : Trois écologistes en pleine discussion : Pierre Ferron, Gordon Edwards et Estelle Lacoursière

PHOTO : Guy Roy et Anne-Marie Beauregard

PHOTO : Patrick Rasmussen en entrevue

PHOTO : Le Dr Michael Dworkind, membre du Groupe Médecins pour la Survie mondiale

PHOTO : Michel Fugère, Patrick Rasmussen et Anne-Marie Beauregard, et de dos Manon Marchand

PHOTO : Steven Guilbeault, Michel Gugère, Manon Marchand et Lucie Berthelot

PHOTO : Manon Marchand et Lucie Berthelot

PHOTOS BY ROBERT DEL TREDICI

Notes recueillies lors de la soirée d'information publique
par Patrick Rasmussen et Anna Wallsteadt

La rencontre d'information de la soirée avait pour but d'informer la population de Champlain à propos de l'industrie de l'énergie nucléaire. Cette rencontre avait été organisée par le groupe «Zér0 Nucléaire».

M. Michel Fugère, du Mouvement vert de la Mauricie, accueille les gens en disant qu'il trouve très encourageant que la population réponde en si grand nombre à l'invitation de venir discuter sur le thème «Une politique énergétique québécoise socialement responsable».

Le printemps dernier, des responsables d'Hydro-Québec sont venus expliquer le projet de réfection de la centrale Gentilly-2 à la population des régions concernées. Des citoyens de Champlain ont donc voulu, de concert avec le Mouvement vert de la Mauricie, y voir plus clair et organiser la présente rencontre.

Une brochette d'experts a donc été mobilisée pour répondre aux questions de la population; étaient présents : le Dr. Gordon Edwards, président du Regroupement de surveillance du nucléaire et consultant en matière d'énergie nucléaire, Steven Guilbault, de Greenpeace, spécialiste des questions touchant le protocole de Kyoto, et le Dr. Michael Dworkind, médecin généraliste et humaniste, membre du groupe Médecins pour la survie mondiale.

La rencontre a débuté par la présentation publique et commentée de l'exposition de photos de Robert Del Tredici; Le photographe a terminé ses propos en signalant deux de ses ouvrages : une copie de «People of Three Mile Island» a été remise au groupe Zér0 Nucléaire, et une copie de «At Work in the Field of Bombs» fut aussi remise au Regroupement des travailleurs accidentés du nucléaire.

Période de questions

Q : Champlain se trouve à moins de cinq milles de la centrale; les rejets de particules radioactives comme le tritium peuvent-ils avoir eu des conséquences sur les trois tumeurs malignes que j'ai eues dans ma vie?

R : Le rôle des radiations est clair, mais tout est une question de dose. Les études ont montré que des petites doses à long terme peuvent avoir des effets. Certaines études le confirment, et d'autres non. Les mineurs ont un taux plus haut de cancer du poumon que les autres; c'est la meilleure réponse possible. La prévention reste très importante; une bonne alimentation, des tests de dépistage et bien entendu , il faut arrêter de fumer.

Il est toujours très difficile, même si l'incidence est le double ou le triple, de se prononcer pour un cas particulier,.

Q : Combien de temps sera fermée la centrale si on en fait la réfection?

R : Si on rénove la centrale, on devra la fermer pour au moins une durée de 18 mois. En Ontario, un réacteur a fermé il y a 4 ans et il n'est pas encore reparti. L'amélioration de l'efficacité énergétique nous permettrait à elle seule de palier au manque de production de Gentilly-2, ce pour l'ensemble du réseau d'Hydro-Québec.

Q : Dans le pire des cas (accidents à la centrale de Gentillys-2), quels seraient les effets pour les gens de Champlain?

R : Officiellement, 31 personnes sont mortes à Tchernobyl; mais plus de 20 000 autres personnes sont également mortes de maladies consécutives à l'exposition à la radioactivité, de façon plus ou moins rapide, tout dépendant du type de problèmes. Si un accident arrive à Gentilly-2 et que le vent va vers le sud, ça serait beaucoup moins grave pour les gens de Champlain; mais la radiation continuerait tout de même à exister, engendrant des maladies et une mauvaise qualité de vie.

Il faut bien comprendre que la région de Tchernobyl est maintenant évacuée et totalement invivable. Selon un rapport de 1968 «Sécurité du nucléaire en Ontario», la probabilité d'une catastrophe est une chose possible. Comme conséquences, il y aurait des milliers de morts dans l'immédiat, et plusieurs dizaines de milliers d'autres décès plus tard suite à des maladies causées par la contamination. On évalue les coûts d'un tel accident à plus de quinze milliards de dollars.

Q : Quels sont les impacts de la contamination au tritium rejeté dans l'eau sur la chaïne alimentaire?

R : En général, il n'y a pas d'accumulation de tritium dans la chaïne alimentaire; c'est différent pour le césium ou le strontium. Le tritium ne s'accumule pas, sauf pour le tritium «attrapé» organiquement; il s'agit de tritium qui aurait pris la place de l'hydrogène dans une molécule. Le danger avec le tritium, c'est qu'il entre dans le foetus rapidement et qu'il peut affecter le développement du bébé à naïtre.

Q : Peut-il se concentrer le long des Grands Lacs, à cause des réacteurs nucléaires présents?

R : Selon la Commission mixte des Grands Lacs, il existe une augmentation du tritium dans les Grands Lacs et le Saint-Laurent à cause des CANDU.

Q : La centrale de Gentilly-2 laisse-t-elle échapper du Césium?

R : De petites quantités de césium, une vapeur métallique, peuvent s'échapper de la centrale s'il y a des petites ouvertures; habituellement, il n'y en a pas, mais ça peut être différent dans le cas d'un accident. C'est donc très différent pour le tritium qui est rejeté de façon routinière.

Il ne faut pas oublier que l'isotope le plus radioactif est le plutonium. Un (1) micro gramme de plutonium dans un poumon, c'est un cancer assuré.

Q : J'ai eu quatre tumeurs à la glande thyroÔde en 3 ans. Parmi mes 65 cousins et cousines, 2 seulement ont eu des tumeurs. L'une demeure à Champlain, l'autre à Gentilly… .

R : Il est très difficile de prouver le lien entre un cas individuel de tumeurs et la radiation. Il est cependant possible que ce cas soit à ce point anormal, que l'on puisse penser qu'il est probable qu'il soit causé par la radiation. Il faut de toute urgence éliminer la cause; Il est trop tard pour vous, mais pas pour les autres.

Q : Quelles sont les probabilités qui jouent en faveur de la réfection ou pour la fermeture de la centrale?

R : On ne peut fournir de probabilités au moment ou on se parle. Nous savons cependant que la réfection coûtera environ 800 millions de dollars, et probablement 2 ou 3 fois plus; il faut reconstruire le réacteur de l'intérieur. Plusieurs parties seront remplacées, et le matériel enlevé sera radioactif.

Q : Y a-t-il déjà eu des études sur le pourcentage (la fréquence) de maladies autour de Gentilly?

R : Non, pas pour Gentilly-2. Hydro-Québec devrait financer cette étude avant de procéder à la réfection; cela devrait leur revenir. Un film documentaire sur les maladies dans la communauté pourrait par exemple être tourné; on ne peut prouver le lien avec un cas particulier, mais on peut en faire un exemple impressionnant.

Q : Hydro Québec fait des études sur les fermes; les résultats de ces prélèvements sont-ils disponibles?

R : Généralement ce genre d'information est difficile à obtenir. Jacques Cousteau était de la première conférence pour l'utilisation pacifique de l'atome; il a remarqué que l'industrie nucléaire est dominée par des physiciens et des ingénieurs, pas par des biologistes ou des médecins. L'approche des physiciens et des ingénieurs est de mesurer la radiation et d'expliquer que c'est négligeable. L'approche du biologiste est d'étudier la population. La différence dans l'approche est très importante.

Certains isotopes peuvent se retrouver dans le lait maternel s'ils entrent dans la chaïne alimentaire; Ils peuvent passer par là pour contaminer les enfants. Pour ce qui est des échantillons pris sur des fermes, l'Hydro-Québec compile probablement simplement les informations; ce n'est pas une étude d'impacts sur la population, cette entreprise ne veut pas la faire.

Q : Pourquoi devrait-on se fier plus à vous (panel d'experts) qu'à l'Hydro-Québec?

R : (Un auditeur)  Le fardeau de la preuve appartient aux victimes. L'industrie du nucléaire est un industrie du mensonge, du secret. Il y a un manque au niveau des suivis épidémiologiques. Les événements pris séparément ne veulent rien dire; mais mis ensemble, ces cas peuvent prouver que la centrale cause du tort. Les déchets qui sortent de là sont dangereux pour encore 500 000 ans, et c'est ce qu'on laissera aux générations futures.

D'un autre point de vue, que pourrait-on faire avec ces 800 millions de dollars qui grimperont probablement à 1,5 à 2 milliards? La compagnie Bombardier a acheté la technologie qui s'appelle le mur solaire pour leur usine de Dorval, un mur noir qu'on place au sud; après un investissement de 300 000 dollars, ils économisent 200 000 dollars par an sur leur facture d'électricité, et ce pour les vingt années à venir. Il est possible d'installer, même au coeur de Montréal, un chauffe-eau solaire qui ferait économiser des sommes importantes. Simplement du côté économique, le nucléaire n'a pas de bon sens. On ne peut prévoir ce qui arrivera la semaine prochaine, et l'industrie nucléaire nous dit qu'elle peut assurer la sécurité de la population pour les 50 à 60 000 prochaines années, c'est impensable. Ne nous croyez pas, faites vous-mêmes vos propres recherches et tirez-en vos propres conclusions.

Selon le Conseil des sciences du Canada, le niveau admissible pour des substances cancérigènes doit être zéro. La Commission mixte internationale annonçait que le niveau acceptable pour les substances toxiques dans les Grands Lacs doit être zéro. On doit travailler pour atteindre zéro pour les substances toxiques persistantes. Si ces principes s'appliquent également au nucléaire, on doit tout arrêter immédiatement; le nucléaire ne peut fonctionner sans produire de telles substances.

Q : Est-ce que Hydro-Québec doit demander la permission pour procéder à la réfection, est-ce que tout est joué?

R : Tout n'est pas joué. La décision doit se prendre à deux niveaux; au Conseil d'administration d'Hydro-Québec et au Gouvernement du Québec. L'échéancier n'est pas encore fixé.

Le premier permis requis est celui de l'agrandissement du site d'entreposage des déchets; sans cet agrandissement, la réfection ne peut pas se faire. La solution la plus simple serait donc de ne pas accorder ce permis.

Q : Même si on ferme la centrale, n'y a-t-il pas un énorme problème avec le matériel radioactif qui est là dans le moment?

R : Oui c'est vrai, mais on peut arrêter d'en produire; le tritium continue de s'accumuler aussi longtemps que la centrale fonctionne. Si elle arrête, le niveau de tritium baissera tranquillement parce qu'il n'y aura plus d'apports.

Q : Viendriez-vous vivre à Champlain avec vos enfants?

Le Dr Edwards répond qu'il demeure dans un sandwich nucléaire entre Gentilly-2 et la centrale de Darlington en Ontario. Les catastrophes concernent tout le monde. Pour ce qui est des déchets, tant qu'il n'y a pas de fuites, il n'y a pas de problème apparent. Nous sommes ici pour montrer qu'il y a un problème. Il qualifie la municipalité de Champlain d'oasis au bord du fleuve.

Le nucléaire est une technologie sans avenir. Aucun nouveau réacteur n'est en construction au Canada, et Hydro-Québec n'a aucun plan pour en construire de nouveaux au Québec. La réfection de Gentilly-2 est en fait la construction d'un nouveau réacteur dans l'ancien, parce qu'il serait très difficile d'obtenir une permission pour un nouveau site. En Ontario, les réacteurs ne fonctionnent toujours pas après avoir dépensé 1,2 milliard de dollars. Il est beaucoup plus simple de dire qu'on ne veut pas du nucléaire au Québec.

Le lien épidémiologique entre la cause et l'effet est difficile à faire. On sait qu'il y a un changement climatique, mais on ne peut pas dire que la crise du verglas est une conséquence de ce même réchauffement; c'est la même chose pour les inondations du Saguenay. Les compagnies d'assurances nous disent que le nombre de catastrophes naturelles a augmenté de 400% depuis 50 ans; on peut dire la même chose pour l'augmentation des cancers de la peau et la réduction de la couche d'ozone. «Mais habiter ici, j'y penserais à deux fois» d'ajouter Steven Guilbeault.

Le Dr Dworkind, pour sa part, ajoute que si le réacteur était fermé et que le risque était revenu à la normale, il viendrait vivre à Champlain. Il trouve que c'est un très bel endroit. En principe, le nucléaire cause des risques inacceptables. Même si la probabilité d'accidents est petite, on ne doit pas se soumettre à ce risque; et les déchets sont présents pour toujours. Même à Montréal, la population n'est pas à l'abri d'un accident nucléaire du type «Tchernobyl» qui se produirait à Gentilly-2.

Q : En 1955, trois personnes sont allés travailler dans la mine d'Elliot Lake où elles faisaient d'excellents salaires, les plus élevés en Ontario dit-on. Les trois sont mortes d'exposition à l'uranium; le message est clair, on ne veut pas de l'uranium. Dans toutes les réunions qu'on a eues, les gens disent qu'ils ne veulent pas du nucléaire.

Les autorités niaient à l'époque les risques élevés; maintenant, en observant les données de mortalités, on voit que c'est évident. Malheureusement, il est trop tard pour tous ces travailleurs et leurs familles.

Q : Que pensez-vous de l'irradiation des aliments comme méthode de conservation?

R : Il est vrai que l'irradiation des aliments permet de mieux contrôler les microbes lors du transport des aliments; mais la radiation pourrait affecter les qualités nutritives de la nourriture, comme les vitamines. De plus, aucune étude à long terme n'a été produite.

Les effets sur l'aliment sont importants, mais un autre côté est important; le transport des substances hautement radioactives dans l'usine d'irradiation présente des dangers. Un accident dans une usine d'irradiation pourrait avoir des conséquences très fâcheuses en disséminant des grandes quantités de cobalt 60 radioactif; c'est très dangereux. La livraison de cobalt radioactif continue toute l'année à l'usine; c'est un autre problème de sécurité.

Tout le système d'alimentation dans son ensemble présente d'importantes lacunes; chaque repas consommé au Canada nécessite en moyenne 2500 kilomètres de déplacements. Nous avons des bananes d'Amérique centrale, des oranges de la Floride, des légumes de Californie; tout cela a un impact sur les changements climatiques. Il faudrait donc acheter plus localement, de la nourriture biologique autant que possible, sans OGM. Un guide est disponible pour faire des achats sans OGM sur le site de Greenpeace.

De plus, sur le site www.ccnr.org, on retrouve les conclusions d'une Commission parlementaire d'il y a quelques années qui avise le gouvernement du fait que plusieurs problèmes existent avec la technologie de l'irradiation et qu'on devrait cesser de l'utiliser.

Q : Quel est le risque d'accident? Plusieurs articles démontrent qu'au début des années 90, même en fonctionnant bien, la centrale souffrait de plusieurs problèmes. Quels seraient les impacts d'un accident sur les industries proches, comme dans le parc industriel de Bécancour?

GRAPHIQUE : Zone concentrique de 8 km autour de Gentilly-2 dans laquelle de l'iode sera distribué en cas d'incident…

R : Cela dépend de la quantité de radioactivité. Cela dépend s'il y a des dommages au coeur du réacteur et s'il y a un passage vers l'extérieur pour la radiation. Selon le rapport de 1968, dans les pires cas, on doit évacuer pour une grande période de temps une grande zone, tout dépendant de la direction du vent et de l'efficacité du confinement. On a d'ailleurs noté des fuites importantes lors des tests à Gentilly-2.

Q : Une personne de Tchernobyl en visite au Québec peut elle «transmettre» la radioactivité, peut-elle affecter les autres personnes?

R : Non, pas du tout.

Q : Et si cette personne avait un enfant?

R : Les dommages se développent sur une longue période, période variant selon le type de cancer. Ce n'est pas possible, pour cette personne, de passer ses dommages à une autre, car ils sont sur ses propres cellules.

Q : Pourquoi Hydro-Québec veut-elle garder le nucléaire, est-ce un avantage économique?

R : Il existe peu d'enthousiasme pour le nucléaire dans l'administration senior d'Hydro-Québec, mise à part l'équipe du nucléaire qui s'y trouve «mariée». La raison pour laquelle ils maintiennent la centrale ouverte, c'est pour maintenir une certaine expertise minimale dans le domaine. Cette expertise peut cependant être maintenue en fermant Gentilly-2, puisqu'il existe plusieurs réacteurs dans le monde qui nécessiteront une fermeture. On pourrait demander au gouvernement fédéral de financer le démantèlement de Gentilly-1 et ainsi profiter de l'expertise en question. On éliminerait ainsi un problème qui devra être réglé un jour ou l'autre. Environ une centaine de réacteurs doivent être démantelés d'ici 2020.

GRAPHIQUE : Le démantèlement d'un réacteur nécessite une bonne expertise et offre des possibilités d'emplois rémunérateurs

La question de la perte l'emplois dans le domaine du nucléaire peut se résoudre partiellement à moyen terme, puisque les nombreux problèmes reliés à la disposition des déchets nucléaires restent sans solution. Le fait de démanteler les centrales fournira aussi le travail pour les années, voir les siècles à venir.

Q : Quels sont les meilleurs arguments pour convaincre quelqu'un; quelles sont les chances de voir échouer le projet de réfection de la centrale?

R : Avec la fermeture, on peut garder l'expertise du démantèlement, ce qui est un gain appréciable à l'échelle internationale; de plus, le Premier ministre à promis une enquête publique sur l'énergie. Les chances sont bonnes, mais ce n'est pas gagné d'avance; c'est une bataille qu'on peut gagner.

Le Québec n'a pris aucun engagement avec l'industrie nucléaire; si la population se mobilise pour manifester sa volonté, il est probable que le projet échouera. Il est possible de gagner sur un momentum; de tels succès se sont matérialisés dans le passé.

Un auditeur ajoute que selon un sondage de l'Industrie nucléaire canadienne, 67 % des Québécois ne veulent pas du nucléaire; cette étude est disponible sur leur site Internet, en anglais seulement.

Q : Comment peut-on dire non au nucléaire? Qui doit-on appeler? Notre député!

R : En septembre dernier, la rencontre de six personnes a donné naissance au groupe Sortir du Nucléaire. Si un seul endroit en Amérique du Nord peut dire non au nucléaire, c'est bien au Québec. Comment peut-on y arriver? C'est Hydro-Québec qui doit prendre la décision; mais le risque du nucléaire n'est pas vécu par Hydro-Québec, mais bien par la population. Les gens peuvent envoyer leurs commentaires à Hydro-Québec pour appuyer le rapport.

Georges W. Bush avait dit, lors des élections présidentielles, être prêt à relancer l'industrie du nucléaire aux États-Unis. M. Caillé a déjà dit qu'un des critères pour le développement énergétique au Québec, c'est l'acceptation dans la communauté. La communauté, ici, semble avoir une opinion bien arrêtée; il faudra aller porter le message et s'assurer qu'il soit bien compris.

M. Patrick Rasmussen lance alors un appel à la population de Champlain. Un questionnaire de suivi épidémiologique est en construction; les gens qui veulent partager des données, qui ont été par exemple victimes de cancers, peuvent contacter le Mouvement vert de la Mauricie au 532-1717.

Q : Comment peut on palier à la baisse de la valeur immobilière causée par la présence de la centrale?

R : Quand le réacteur sera fermé, les gens dormiront mieux, craignant moins pour leur santé, et la valeur de leurs biens immobiliers augmentera.

L'accident de Three Miles Island a été causé par l'erreur d'un ouvrier qui a fermé une valve et qui a oublié de la réouvrir ensuite; cette erreur a occasionné la fusion du coeur du réacteur et l'accident a coûté plus de 2 milliards de dollars. Un dessin paru dans une publication montrait un centre de contrôle de réacteur nucléaire, mais à la place des contrôleurs on pouvait voir des singes. Les deux scientifiques se tenant derrière se serraient la main en disant «Enfin, nous avons éliminé l'erreur humaine».

Mot des organisateurs

Dans les années à venir, on considérera le nucléaire comme une erreur du passé. En considérant la situation actuelle, les sources d'énergie qui ont de l'avenir ne sont pas le gaz naturel ou le nucléaire, mais l'éolien et le solaire.

Ces sources d'énergie connaissent une rapidité de croissance comparable à celles des ordinateurs personnels ou de la téléphonie cellulaire. Si l'on veut du vrai développement, de la création d'emplois tout en conservant les richesses naturelles, voilà ce qu'on doit faire.

On n'a pas suffisamment parlé du problème principal avec le nucléaire, soit la nuisance du plutonium dans le combustible usé. Ce plutonium peut servir pour la fabrication des bombes nucléaires. Quand on fait fonctionner un réacteur nucléaire, on ajoute continuellement du plutonium dont on ne sait que faire; il subsistera même après la fermeture du réacteur.

Nous vous remercions de votre accueil, nous du Mouvement vert de la Mauricie et de Zéro Nucléaire. Bonne chance et bonne route.

Mot de la fin de M. René Beaudoin, maïtre de cérémonie

Merci à chacun d'entre vous pour avoir été là; et merci à Anne-Marie Beauregard, Lucie Berthelot, Manon Marchand, Diane Lanouette, Réjean Laprise, Manon Boudreau et Marcel Jetté, les membres fondateurs du groupe Zéro nucléaire. Merci d'avoir préparé cette soirée.

Des choses fort intéressantes ont été soulevées, comme la santé; n'oublions pas aussi les considérations économiques. M. Guilbeault attirait notre attention sur les 800 millions, ou plutôt les 2 milliards que ça pourrait coûter; on peut imaginer ce que cette somme pourrait permettre si on la consacrait à la mise en place de solutions alternatives. Il y a là aussi bien d'autres arguments forts intéressants à invoquer, en plus de ceux qui touchent la santé.

N'oubliez pas que la première chose à faire demain est d'écrire à votre député et au Premier ministre pour dire NON au nucléaire.

PHOTO : Plusieurs participants et participantes au Colloque sur le nucléaire au Foin Fou de Champlain; la photographie a été prise dans un environnement exceptionnel par Robert Del Tredici

ANNEXES

I. Wôlinak s'oppose à la réfection de Gentilly-2. (2 pages)

II. Questions à Hydro-Québec sur la contamination radioactive de travailleurs. (2 pages).

III. Lettre du 2 décembre 2003 à Michel Rhéaume. (3 pages).

IV. Liste des lettres envoyées aux ministres pour les sensibiliser. (1 page).

V. Texte de la résolution pour Sortir le Québec du nucléaire. Liste des groupes qui ont endossé la résolution. (1 page).

ANNEXE 1

Wölinak s'oppose à la réfection de Gentilly-2

Le Conseil de bande demande au gouvernement
de ne pas donner son aval au projet.

Marcel Aubry, Le Nouvelliste, samedi le 29 novembre 2003, p. 4

Le Conseil de bande des Abénakis de Wölinak a décidé de déposer auprès d'Hydro-Québec une opposition officielle à la réfection et à toute modification de la centrale nucléaire de Gentilly-2.

Il demande aussi au gouvernement du Québec de «ne pas donner son aval au projet d'expansion du site de stockage extérieur de déchets nucléaires hautement radioactifs à la centrale Gentilly-2.

La résolution adoptée par le Conseil de bande demande également au gouvernement du Québec, actionnaire unique d'Hydro-Québec, de recommander au conseil d'administration d'Hydro-Québec de ne pas approuver les plans de réfection du réacteur Gentilly-2 et de déclarer que «le Québec sera la première instance gouvernementale en Amérique du Nord à se retirer progressivement du nucléaire d'ici 2008, date à laquelle la centrale Gentilly-2 sera fermée en permanence».

Le texte de la résolution, signé par le chef, M. Raymond Bernard, et ses quatre conseillers, mentionne que l'utilisation de l'électronucléaire comporte des risques ayant des conséquences irrémédiables sur les écosystèmes et les humains.

La résolution fait état que Gentilly-2, le seul réacteur nucléaire de puissance installée au Québec, ne pourra continuer de fonctionner au-delà de 2008 à moins de subir des réparations de 845 millions $, soit le même montant que son jumeau de Point Lepreau, au Nouveau-Brunswick, où la Commission des entreprises de service public a recommandé de ne pas procéder à la réfection.

Les auteurs de la résolution allèguent que la section nucléaire d'Hydro-Québec cherche aussi à obtenir l'aval du gouvernement du Québec pour agrandir son parc existant de stockage en surface de déchets nucléaires, un agrandissement qui ne saurait être justifié, selon eux, que si le coûteux projet de réfection du réacteur était éventuellement approuvé.

Le Conseil de bande rappelle qu'il n'existe présentement aucune méthode d'évacuation des grappes de combustible hautement radioactive malgré les recherches (étalées sur 15 ans, au coût de 700 millions $) effectuées par Énergie Atomique du Canada limitée et Ontario Hydro et que les travaux de réfection de Gentilly-2 nécessiteraient le stockage additionnel de plusieurs milliers de grappes de combustible irradié à l'extérieur du bâtiment du réacteur.

Les travaux de réfection, ajoutent-ils, occasionneraient «la production d'autres déchets hautement radioactifs sous la forme de centaines de tubes de force métalliques irradiés, dangereusement radioactifs, pour des milliers d'années, qui devront être emballés et stockés à l'extérieur».

Dans une lettre qu'il a d'ailleurs adressée au président-directeur général d'Hydro-Québec, M. André Caillé, le chef Raymond Bernard mentionne que le représentant du Chef de bande a assisté aux rencontres de la Table d'information et d'échange sur l'avant-projet de modification des installations de stockage des déchets radioactifs et de réfection de la centrale nucléaire et qu'à ce jour, il n'a pas reçu de réponses claires de la part des représentants d'Hydro-Québec.

Lors de la dernière campagne électorale, le Parti libéral avait fait part de son intention de tenir une enquête scientifique et indépendante sur le plan de développement énergétique, le rapport de cette enquête devant être publié au plus tard en 2006. Dans sa lettre adressée à M. Shawn-Patrick Stensil de l'organisme Campagne sortir du nucléaire, le chef du PLQ. M. Jean Charest, rappelait que son parti s'était prononcé contre le développement de l'énergie nucléaire. «Un prochain gouvernement libéral, écrivait-il dans sa lettre datée du 8 avril 2003, entend revaloriser le rôle de la Régie de l'énergie en lui donnant les moyens et en lui permettant de soumettre des programmes d'efficacité énergétique».

Infosn mailing list Infosn@list.web.net.

ANNEXE 2

Communiqué de presse - le 3 décembre 2003

La Campagne sortir du nucléaire

Questions à Hydro-Québec sur la contamination radioactive de Un médecin, un consultant en rayonnement et un travailleur du nucléaire souffrant du cancer s'unissent pour reprocher à Hydro-Québec de ne pas protéger ses travailleurs contractuels de la contamination radioactive. Ils dénoncent aussi la banalisation récente par Hydro-Québec de l'irradiation de plusieurs contractuels dont les corps ont été contaminés par de la poussière radioactive. Ceux-ci effectuaient des travaux durant une période de fermeture anormalement longue du réacteur Gentillprésident du Regroupement pour la surveillance du nucléaire, et Marcel Jetté, président du Regroupement des travailleurs accidentés du nucléaire. Monsieur Jetté, victime de cancer, a travaillé à plusieurs occasions à Gentilly-1 et Gentilly-2. Il croït que sa maladie est le résultat de son exposition professionnelle aux rayonnements.

Les trois ssur les victimes plutôt que d'assumer la responsabilité de ces lamentables incidents, Hydro-Québec fait montre de manque de professionnalisme et d'indifférence pour le bien-être de ses contractuels»  déclare M. Edwards. «Ces personnes contaminées ne travaillent pas habituellement en milieu nucléaire. Ils n'ont pas l'habitude de travailler dans des emplacements dangereux au niveau de la radioactivité. Il nous paraït évident qu'Hydro-Québec fait preuve de laxisme, que ce soit au niveau de la formation ou de la supervision de ces travailleurs ou les deux» poursuit-il.ve des travailleurs.

Dans son édition du 25 novembre 2003, Le Nouvelliste de Trois-Rivières cite la responsable desrépanier, qui laisse entendre que ces travailleurs ont été contaminés à cause de gestes qu'ils n'auraient pas dû poser, comme se passer un gant au visage et se frotter le genou trop vigoureusement.sage et se frotter le genou trop vigoureusement.

«En jetant le blâme sur les victimes plutôt que d'assumer la responsabilité de ces lamentables incidents, Hydro-Québec fait montre de manque de professionnalisme et d'indifférence pour le bien-être de ses contractuels»  déclare M. Edwards. «Ces personnes contaminées ne travaillent pas habituellement en milieu nucléaire. Ils n'ont pas l'habitude de travailler dans des emplacements dangereux au niveau de la radioactivité. Il nous paraït évident qu'Hydro-Québec fait preuve de laxisme, que ce soit au niveau de la formation ou de la supervision de ces travailleurs ou les deux» poursuit-il.

Dans le même article, Mme Trépanier banalise le niveau de contamination en affirmant que «c'est mineur. C'est nettement en dessous des seuils autorisés. Il suffit de se laver et c'est tout. »

«Toute exposition au rayonnement atomique accroït le risque d'un cancer radio-induit et doit être pris au sérieux» affirme le docteur Dworkind. «Les limites réglementaires touchant l'exposition des travailleurs aux rayonnements ne protègent pas ces individus contre le risque d'un cancer. De plus, dans les cas où la peau est contaminée par de la poussière radioactive, l'expérience démontre que de fines particules radioactives peuvent être inhalées ou peuvent se loger dans les follicules pilit sortir de la centrale tant que la situation n'est pas revenue dans l'ordre. »ossibles à déloger. Le travailleur peut donc continuer à être irradié pendant des semaines, voire des mois, suite à l'incident. »

Mme Trépanier a affirmé au journal Le Nouvelliste : «Quand les gens retournent chez eux, ils n'ont plus de contamination. De toute manière, ils doivent repasser aux détecteurs avant de sortir. Un travailleur contaminé ne pourrait sortir de la centrale tant que la situation n'est pas revenue dans l'ue dans l'ordre. »ffirmation est fausse», explique Marcel Jetté. «Le 17 novembre, un contractuel travaillant à Gentilly-2 a été contaminé au visage alors qu'il travaillait très près du coeur du réacteur. Il a rapporté cette radio-activité avec lui à la maison pendant trois jours. La décontamination de ce travailleur n'a pas été déclarée complète par Hydro-Québec avant le 20 novembre. Durant cette période, il a pu contaminer ses draps et ses proches. Pourquoi Hydro-Québec ne nous dit-elle pas toute la vérité? Et pourquoi les contractuels sont-ils envoyés dans les secteurs les plus radioactifs de la centrale? » poursuit-il.

Le 25 novembre, Le Nouvelliste rapportait que «dans le cadre de l'arrêt planifié, on devait faire une inspection approfondie de la turbine qui est dans la section où il n'y a pas de radioactivité. » Cette information est trompeuse, car comment ces travailleurs auraient-ils pu être contaminés s'ils ne travaillaient que sur la turbine? Quelle est la véritable nature des travaux qu'on demande à ces travailleurs d'exécuter?

Une copie de la lettre envoyée aux responsables de Gentilly-2 est annexée au présent communiqué.

- 30 -

Pour de plus amples renseignements, veuillez prendre contact avec :

Michael Dworkind, M.D. Membre du Centre de prévention du cancer de l'Hôpital général juif ; et Membre du conseil d'administration de Médecins pour la survie mondiale (514) 340 8278

Gordon Edwards, Ph.D. Consultant en rayonnement, et Président du Regroupement pour la surveillance du nucléaire (514) 860 9984


C. P. 236, Succ. Snowdon
Montréal (Québec)
H3X 3T4
le 2 décembre 2003

Monsieur Michel R. Rhéaume
Chef, Affaires réglementaires, environnementales
et consultations publiques d'Hydro-Québec Centrale de Gentilly-2
4900, boulevard Béca

ord nous faire parvenir une copie du matériel éducatif que vous utilisez pour former les travailleurs contractuels qui sont amenés à travailler dans des secteurs radioactifs de la centrale nucléaire Gentilly-2,  en particulier celui se rapportant au danger d'exposition au rayonnement et à la contamination radioactive, de même que celui qui se rapporte aux procédures à suivre par les travailleurs dans le cas d'une telle contamination radioactive ?

eurs contaminés par des matériaux radioactifs, a piqué notre intérêt. Nous aimerions avoir de plus amples renseignements.

Pourriez-vous d'abord nous faire parvenir une copie du matériel éducatif que vous utilisez pour former les travailleurs contractuels qui sont amenés à travailler dans des secteurs radioactifs de la centrale nucléaire Gentilly-2,  en particulier celui se rapportant au danger d'exposition au rayonnement et à la contamination radioactive, de même que celui qui se rapporte aux procédures à suivre par les travailleurs dans le cas d'une telle contamination radioactive ?

Deuxièmement, nous aimerions avoir vos réponses aux questions suivantes :

  1. A quelle distance du coeur du réacteur se trouvaient les travailleurs contractuels lorsqu'ils ont été contaminés ?

  2. Quelle est la nature des matériaux radioactifs qui ont contaminé les travailleurs ? en clair, de quels radionucléides s'agit-il ?

  3. La contamination serait-elle liée à des travaux portant sur le circuit de refroidissement primaire (comme la coupe de tuyaux, par exemple) ou ayant un effet sur ce circuit ?

  4. Hydro-Québec fournit-elle des masques complets à tous les contractuels travaillant dans ces zones radioactives ?

  5. Combien de contractuels ont subi une formation pour travailler dans les zones plus radioactives de la centrale pendant cette fermeture prolongée ?

  6. Y a-t-il un lien entre le travail effectué par les contractuels dans les secteurs radioactifs de la centrale et les plans d'Hydro-Québec pour la réfection du réacteur ?

  7. Comment Hydro-Québec peut-elle être certaine qu'il ne reste aucune contamination résiduelle dans le nez, les poumons,  les sinus ou les follicules pileux des individus qui ont été décontaminés ?

Comme Hydro-Québec prévoit réaliser d'importants travaux au niveau du coeur du réacteur et du circuit caloporteur primaire dans le cadre de son projet de réfection du réacteur Gentilly-2, il nous paraït essentiel que soient donnés aux travailleurs et au public en général des renseignements précis et impartiaux quant à la nature du travail, à l'état de préparation des travailleurs et aux caractéristiques des dangers d'irradiation pouvant être présents.

Dans l'attente de votre réponse, nous vous prions d'agréer, Monsieur, nos salutations distinguées.


ANNEXE 3

Liste des lettres envoyées aux Ministres


ANNEXE 4

Résolution pour sortir le Québec du nucléaire

ÉTANT DONNÉ QUE l'utilisation de l'électronucléaire comporte des risques ayant des conséquences irrémédiables sur les écosystèmes et les humains;

ÉTANT DONNÉ QUE Gentilly-2, le seul réacteur nucléaire en opération installé au Québec, ne pourra pas continuer de fonctionner au-delà de 2008 à moins de subir des réparations majeures très coûteuses dues au vieillissement prématuré;

ÉTANT DONNÉ QUE le projet de réfection de Gentilly-2 sera soumis à l'assentiment du Conseil d'administration d'Hydro-Québec très prochainement;

ÉTANT DONNÉ QUE la section nucléaire d'Hydro-Québec a estimé le coût de sa réparation à 845 millions de dollars, soit précisément le même chiffre que celui avancé par la Société d'énergie du Nouveau-Brunswick pour le coût de réfection de la centrale de Point Lepreau, «jumelle identique» de Gentilly-2;

ÉTANT DONNÉ QUE la Commission des entreprises de service public du Nouveau-Brunswick, suite à une vaste consultation publique dans cette province, a déclaré en 2002 que les véritables coûts de réfection de la centrale de Point Lepreau pourraient surpasser de beaucoup l'estimé de 845 millions de dollars;

ÉTANT DONNÉ QUE la Commission des entreprises de service public du Nouveau-Brunswick a recommandé de ne pas procéder à la réfection de la centrale de Point Lepreau parce que le risque financier irait à l'encontre de l'intérêt du public et que d'autres formes d'énergie moins coûteuses et plus fiables sont préférables;

ÉTANT DONNÉ QUE la section nucléaire d'Hydro-Québec cherche présentement à obtenir l'aval du gouvernement du Québec pour agrandir son parc actuel de stockage en surface des déchets nucléaires hautement radioactifs, un agrandissement qui ne saurait être justifié que si le coûteux projet de réfection du réacteur était éventuellement approuvé;

ÉTANT DONNÉ QUE le gouvernement Bourassa a établi en 1989 une politique statuant que le Québec ne permettrait pas le stockage permanent de déchets hautement radioactifs (dont les grappes de combustible irradié en particulier) sur le territoire québécois ou à proximité de celui-ci;

ÉTANT DONNÉ QU' il y a des milliers de grappes de combustible irradié, entreposées sur les rives du Saint-Laurent à côté du réacteur Gentilly-2, dans des conteneurs «de stockage temporaire»;

ÉTANT DONNÉ QU'il n'existe présentement aucune méthode d'évacuation de ces grappes de combustible hautement radioactives, ce malgré des recherches étalées sur 15 ans (de 1978 à 1993) et au coût de 700 millions de dollars, effectuées par Énergie atomique du Canada limitée et Ontario Hydro;

ÉTANT DONNÉ QUE les travaux de réfection de Gentilly-2 nécessiteraient le stockage additionnel de plusieurs milliers de grappes de combustible irradié à l'extérieur du bâtiment du réacteur;

ÉTANT DONNÉ QUE les travaux de réfection de Gentilly-2 occasionneraient la production d'autres déchets hautement radioactifs sous forme de centaines de tubes de force métalliques irradiés, dangereusement radioactifs pour des milliers d'années, qui devront être emballés et stockés à l'extérieur;

ÉTANT DONNÉ QUE l'arrêt du réacteur Gentilly-2 sans réfection mettrait fin à la production de déchets nucléaires hautement radioactifs au Québec;

ÉTANT DONNÉ QUE l'arrêt du réacteur Gentillys-2 sans réfection éliminerait une cible potentiellement accessible aux groupes terroristes internationaux qui pourraient être tentés de s'en prendre à la seule centrale nucléaire située le long de la voie maritime du Saint-Laurent;

ÉTANT DONNÉ QUE la centrale Gentilly-2 a toujours produit la part la plus dispendieuse de l'électricité servant à satisfaire les besoins de base de la province;

ÉTANT DONNÉ QUE le réacteur de Gentilly-2 ne contribue qu'à fournir une part insignifiante de la production électrique totale du Québec;

ÉTANT DONNÉ QUE le gouvernement Lévesque a imposé un moratoire en 1978 sur la construction de nouvelles centrales nucléaires au Québec et que ce moratoire a été maintenu sous les gouvernements qui ont suivi;

ÉTANT DONNÉ QU'aucune commande de réacteur nucléaire n'a été placée en Amérique du Nord depuis 1978;

ÉTANT DONNÉ QU'aucune province ou aucun territoire canadien ne prévoit la mise en place de nouveaux réacteurs nucléaires;

ÉTANT DONNÉ QU'un nombre croissant de pays européens, comme la Suède, l'Autriche, l'Allemagne et la Belgique, a promulgué des lois pour sortir du nucléaire;

ÉTANT DONNÉ QU'il serait facile pour le Québec de sortir du nucléaire puisqu'il ne dépend pas de cette technologie pour ses besoins en électricité;

Et

ÉTANT DONNÉ QUE l'investissement de 845 millions de dollars, en faveur de projets communautaires de conservation d'énergie, à la grandeur la province – plutôt que dans la réfection du réacteur vieillissant de Gentilly-2 – dégagerait plus d'énergie suite à l'économie d'énergie, et créerait plus d'emplois dans toutes les régions;

IL EST DONC RÉSOLU

D'inciter le gouvernement du Québec à refuser de donner son aval au projet d'expansion du site de stockage extérieur de déchets nucléaires hautement radioactifs à la centrale de Gentilly-2;

D'inciter le gouvernement du Québec, actionnaire unique d'Hydro-Québec, à recommander au Conseil d'administration d'Hydro-Québec de ne pas approuver les plans de réfection du réacteur de Gentilly-2;

D'inciter le gouvernement du Québec à déclarer, comme politique officielle, que le Québec sera la première instance gouvernementale en Amérique du Nord à se retirer progressivement du nucléaire d'ici 2008, date à laquelle la centrale de Gentilly-2 sera fermée en permanence;

Et

D'inciter le gouvernement du Québec à déclarer, comme politique officielle, que les fonds qui auraient pu servir à la réfection de Gentilly-2 soient plutôt investis dans des projets communautaires de conservation d'énergie partout au Québec.